Aventures en famille

Et si on pédalait un peu !

Écrit par Famille Carrard | 20/11/2012 – 16:26

Encore des montagnes…

Après les petites vacances de Luang Prabang, les choses sérieuses ont recommencé. Nous avions pu nous y préparer, d’abord par l’achat de la carte GT-Rider, destinée aux motocyclistes ; elle est à ce jour la plus précise du pays du haut de son 1:1.650.000 (!) et donc indispensable à tous les usagers des routes laotiennes. Les profils GPS de la route nationale 13 nous ont donné quelques sueurs froides avant d’attaquer les montées. Autre préparation – et pas des moindres – nous avions emmagasiné suffisamment de calories superflues dans les boulangeries de Luang Prabang pour ne pas souffrir de sous-nutrition dès le premier jour de montagne. C’est forts de cette mise en condition digne de Rocky IV, et après avoir retroussé nos socquettes que nous avons attaqué la traversée sur Vang Vieng et Vientiane.

Passons l’épisode récréatif du premier jour (les chutes de Tat Sae et la balade à dos d’éléphant, décrites précédemment) : la première étape encore en fond de vallée a été couronnée par une nouvelle casse de chaîne, puis une nuit de camping « sauvage » dans une cour d’école ; autant dire qu’il ne fallait pas traîner pour empaqueter nos affaires le matin sous peine de se faire éparpiller sardines et tongs aux quatre coins du village…

Les choses ont alors commencé sérieusement : 700 m de dénivelé, soleil de plomb et premiers signes de troubles gastriques, puis de fièvre pour Frédo, pile poil au meilleur moment !

La montée est l’occasion de deux rencontres un peu hors du commun : d’abord un grand Allemand (il devait bien dépasser de deux têtes la taille moyenne d’un indigène adulte), ancien cyclo qui n’est jamais rentré chez lui pour refaire sa vie dans un village laotien. Un kilomètre plus loin, alors qu’on est dans l’avant-dernière côte, un bolide nous arrive dessus à la sortie d’un virage et on entend « Freine ! Freine ! ». Céline et Alex, deux Français, descendent de leur Pino blanc… (pas Pinot Blanc !). Nous sympathisons tout de suite avec ce jeune couple que l’idée de voyager avec des enfants semble titiller la moindre… on refait donc le monde et s’échange quelques bons tuyaux pour la suite de nos périples respectifs dans le seul coin d’ombre du virage. Dommage qu’on ne se soit pas croisés pendant la vraie pause précédente – on n’aurait sans doute jamais redémarré…

La suite de l’étape voit se succéder la fin de la montée jusqu’à un col, la redescente sur l’autre versant (en une demi-heure ce qu’il nous a fallu la journée à gravir). En face, c’est cette fois 1000 m de montée qui nous attendent. Nous optons pour un peu d’autostop et nous faisons lifter par une camionnette.

Au sommet, nous alternons petites et grosses bosses dans des paysages aussi magnifiques que dénués de logements susceptibles de nous accueillir. Dans la vallée suivante, faute d’emplacements décents pour monter la tente et l’état de santé de Frédo n’étant pas au top, nous trouvons finalement à nous loger dans une famille.

Surprise le lendemain matin : ils nous pressent au départ, car les deux membres du couple doivent aller travailler à 7h00. Quelle n’est pas notre surprise de les voir tous deux en uniforme de police !

L’étape du jour débute par une belle montée de 400 m. La suite n’est pas plus plate : tantôt la route suit la crête, offrant un panorama sur toute la chaîne des alentours, tantôt elle franchit en enfilade des vallées secondaires. Nous traversons toute une série de villages montagnards aux habitations surélevées, parfois très modestes et entièrement en bois ou en bambous. Aux diverses manières de bâtir les maisons traditionnelles d’un village à l’autre, nous pouvons identifier la présence de plusieurs groupes ethniques distincts dans ces contrées sauvages.

Seule constante, l’uniforme scolaire des enfants, avec la prééminence de la blouse blanche pour les filles comme pour les garçons. De manière plus surprenante, héritage de la colonisation française oblige, dans chaque localité, le terrain de pétanque constitue le seul replat du lieu, durement gagné sur la montagne.

En fin d’étape, après la grande glissade (comme dirait Eugénie) de 1000 m sur le versant sud, une dernière bosse aux pourcentages de pente non homologués, puis une dizaine de km en dents de scie parachèvent cette journée aussi splendide qu’épuisante.

L’arrivée sur la large vallée de Kasi et ses rizières au soleil couchant  nous offre la plus belle des récompenses (ex æquo avec l’excellent repas concocté dans le restaurant attenant à notre guesthouse). On vous rassure, Frédo boit de nouveau une bière, signe rassurant quant à son état de santé !

Le lendemain, nous pensions en avoir fini avec les journées à rallonge et les montées abruptes et espérions arriver plus frais à Vang Vieng. Ce trajet nous a pourtant donné pas mal de fil à retordre : le dernier petit col à passer était plus ardu que prévu et à la descente, il y avait plus de nids de poules que de goudron – il a d’ailleurs fallu faire un revissage musclé de nos porte-bagages à la pause de Vang Vieng. Enfin, les derniers 20 km sur des routes en chantier en plein cagnard ont complété le tableau.

Mais l’épisode le plus marquant de cette journée a sans conteste été la visite d’une école. Attirés par un drapeau suisse peint sur la façade bien visible de la route, nous sommes entrés dans le préau. De fil en aiguille, nous avons visité les classes et Léon et Eugénie ont ainsi connu leur première expérience scolaire : assis à un pupitre, ils ont fait des dessins pour les enfants de la classe des plus petits, à qui nous avons également offert stylos et papier. Nous avons pu constater que nos enfants étaient encore très gâtés en comparaison des petits Laotiens des montagnes et qu’ils avaient de la peine à se séparer de leurs affaires au moment d’en faire don.

Vang Vieng

Cette petite bourgade moche, entièrement dévolue au tourisme, plantée au centre de paysages idylliques, semble avoir poussé là comme un champignon, un peu à l’image des villes de chercheurs d’or dans les westerns. Une curieuse bande grise de 2 km de long sur une centaine de mètres de large coupe littéralement la ville en deux : c’est ce qui reste d’une ancienne piste d’atterrissage mise en place par les Américains en vue de leurs bombardements contre le Pathet Lao. Depuis quelques années, c’est surtout le centre d’un dense réseau d’activités ludo-sportives (kayak, tubing-bourrage de gueule, spéléo…).

La rive droite de la rivière, reliée au centre-ville par un pont payant, constitue le quartier le plus rural et nous y trouvons un logement aux lits impec’ au milieu des vaches et des buffles. Nous y pratiquons repos et mécanique le premier jour.

Le second, une ballade à travers les rizières nous amène à une grotte où Léon et Eugénie font leur baptême de la spéléo. Eugénie se sentait tellement à l’aise au fond du trou qu’elle a même refusé de ressortir tant qu’elle n’aurait pas vu les ours !

Nous sommes rejoints à Vang Vieng par Fabian et Daya rencontrés à Luang Prabang et avec qui nous avons toujours énormément de plaisir à refaire le monde autour d’un bon repas.

En deux étapes de « plaine » tout de même plus bosselées que ce que nous imaginions,  et sous un soleil de plomb, nous vivons notre troisième pétage de chaîne (ce qui n’est rien en comparaison des pétages de plombs !), cette fois sur le tandem. L’arrêt tech(-pique)-nique qui suit dans un temple bouddhiste est mémorable. Le bonze mué en assistant mécano et en baby-sitter a sans doute connu ce jour-là deux expériences inédites : il a joué aux légos et enfourché un Pino. Très bon pour son karma !

En arrivant à Vientiane, la circulation est souvent bloquée pour faire place à l’une ou l’autre délégation internationale présente pour la conférence de l’ASEM (à chaque carrefour son soldat armé jusqu’aux dents avec en toile de fond les affiches « Warmly welcome… »). Nous galérons un peu à l’arrivée pour trouver une chambre potable, de nombreux guesthouses proposant des logements borgnes et chers ou trop petits pour une famille de quatre.

Vientiane

Après Luang Prabang la récréative, Vientiane l’administrative ! Notre objectif était de régler en trois jours ouvrables nos visas thaïlandais et extensions des visas laotiens, ce qui fut fait avec nos deux loustics, dûment équipés de notre kit de survie : crayons, stylos, papier et légos ! Entre deux, nous avons planifié la suite (et fin) de notre escapade laotienne.

Le samedi, Frédo est parti faire la tournée des magasins de vélos, pour investir dans deux nouvelles chaînes et acheter un dérive-chaîne performant, l’autre étant cassé depuis le premier dépannage. Qui a déjà tenté ce type de réparation au moyen d’un dérive-chaîne cassé, de deux vieux rivets, d’une clé à molette et d’une pince d’électricien comprendra l’utilité d’un tel investissement… Pendant ce temps, le reste de la famille a sauté dans un tuk-tuk pour visiter le café et la bibliothèque du Centre Culturel Français. Léon et Eugénie ont tellement adoré le coin lecture qu’on ne les a pas aperçus durant presque une heure : un record ! L’occasion aussi de rencontrer deux familles d’expats francophones vivant au Laos avec de jeunes enfants.

En fin de compte, une fois les affaires courantes réglées à Vientiane, on se sentait presque chez nous dans cette tranquille capitale à taille humaine. Coiffeur (apéro compris), boulangerie, achats de la vie quotidienne, place de jeux : nous avons davantage eu l’impression de passer un samedi à la maison, que d’être touristes à l’autre bout du monde. Si bien qu’on en a presque oublié les visites et les photos.

Ultimes retrouvailles avec nos amis Daya et Fabian (qu’on ne présente plus) et adieux émus lorsque nous les avons aidés à charger leurs vélos dans le bus : cette fois, ils partaient pour les Philippines via Bangkok. Nous louperons à notre retour en Suisse ces futurs expatriés à Washington DC…

Le 11 novembre, nous nous sommes remis en route. Pour raccourcir un peu le long trajet de la vallée du Mékong et comme le temps file, nous avons pris un bus pour Thakhek, d’où nous poursuivrons à vélo vers le sud, en direction du Cambodge.

Savannakhét l’indigeste, tuna Bouddha pasta et Pakxé bon le café de Bolaven dans le prochain numéro !


3 commentaires »

  1. De Albert Rusterholz le 22 Nov 2012 | Répondre

    Bonjour la famille
    Nous voilà de retour de notre périple australien et c’est avec plaisir que j’ai repris la lecture de vos aventures pédalo-culinaires. Je suis heureuse de vous savoir tous en bonne santé. Vous m’avez donné envie de décuvrir le Laos. Il est 7h30 du matin et je dois aller réveiller Luca, (le petit-fils) pour l’envoyer à l’école. Je vous contacterai plus tard. Amicalement
    Micheline

  2. De Micheline Rusterholz le 27 Nov 2012 | Répondre

    Le plus tard est arrivé ! Je me réjouis de vos retrouvailles avec la famille. Andrée et Jean-Daniel se réjouissent si fort de vous embrasser et moi, je me réjouis du récit qu’ils vont nous faire de leur voyage. Ce matin, devant notre maison, il y avait une voiture parquée dont le toit était couvert de neige, l’auto venait de l’autre côté du Jura. Ici, il fait gris et mouillé, l’herbe du jardin est recouverte de feuilles tombées avec des tons de jaune, ocre, rouge et brun, c’est très beau.
    La série des fenêtres de l’Avent va commencer au village. Des familles, qui souvent se regroupent, invitent la population à venir, vers les 18h00 boire un vin chaud ou manger une soupe, le tout accompagné de quelques grignoteries. La rencontre se fait soit devant la maison (mais gare à la pluie, le froid on suppporte), dans un garage, dans une buanderie, dans un abri… il y autait une étude à faire sur la reconversion des fameux abris antiaeriens ! Bien sûr qu’on s’efforce de décorer la maison mais je crois que c’est plutôt l’odeur de vin/canelle qui attirent les gens… Vous, par contre, devez vivre une ambiance très différente. Je me réjouis de la suite de vos aventures.
    Affectueusement
    Micheline

  3. De Maute Anne Marie le 28 Nov 2012 | Répondre

    Bonjour a vous tous ,

    Je suis contente de voir que tout va bien ,que vous êtes content et heureux de votre voyage.
    Pour moi tout va bien aussi .
    Je vous embrasse et vous dit bonne continuation
    bien du plaisir.
    A bientôt
    Grand maman
    Anne Marie

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