Plein sud… et des détours !
Écrit par Famille Carrard | 22/06/2013 16:08On the road…
Rouler à vélo en Australie, c’est un peu comme faire du surf au Cap Nord ou du hockey sur glace en Libye : on a légèrement l’impression d’être des originaux. Ici, la maison roulante est grande reine ! Et quand ce n’est pas le 4×4 qui tire la caravane, c’est le camping-car qui balade une jeep (pour les petites escapades). Voyager léger n’est pas dans les habitudes des gens ici… Donc sur les routes, quand on est cycliste, on met son gilet fluo, on tient sa gauche, on espère que les autres usagers regardent la route et on croit en sa bonne étoile.
Pour ce qui est des routes, nous aurons à peu près tout fait : aux abords de certaines agglomérations, il y a de vrais itinéraires cyclables bien balisés et la plupart des chemins pédestres en bord de mer, sur les quais et dans les espaces verts sont ouverts aux vélos: « share the path ».
Par contre, les entrées et sorties de villes réservent parfois des surprises, avec des pistes cyclables balisées qui mènent aux fraises, dans des culs-de sac ou un talus. Idem lorsqu’on arrive dans les lieux habités : on se fait klaxonner parce que nous ne sommes pas à notre place, alors qu’il y a une piste cyclable de l’autre côté de la glissière ; la question est de savoir comment y accéder lorsqu’on arrive par la route…
Nous avons fait passablement de kilomètres sur la Pacific Highway. C’est très variable: elle peut être sous sa forme non rénovée, comme une petite route cantonale chez nous ou être une autoroute super moderne où les cycles sont autorisés à rouler sur ce qui est assimilable à la bande d’arrêt d’urgence. Lorsque celle-ci est large et séparée par des bandes rugueuses, ça va ! Lorsque c’est en travaux ou que l’on se trouve sur la vieille autoroute aux accotements pourris, c’est un peu plus stressant. Nous avons au maximum pris les petites routes, mais finalement, comme elles sont étroites, ce n’est pas forcément plus rassurant lorsqu’un gros bahut déboule.
Nous avons tenté l’expérience rurale, avec les petits chemins de campagne, goudronnés ou pas. Nous avons quelquefois fait de belles tirées de 30 km sur des « dirt roads », de terre et gravier damé au cœur de paysages et couleurs magnifiques dans des parcs nationaux. C’est plus fatiguant, mais là on est en immersion totale dans l’Australie campagnarde et on se sent seuls au monde. Sentiment assez fou, après des mois d’Asie où nous avions toujours l’impression d’avoir du monde autour de nous même dans les coins les plus perdus. Allez faire pipi derrière un arbre en Chine, la place est déjà prise !
One, two, three… soleil !
Le climat se déglingue et il n’y aura vraisemblablement aucun Européen pour le nier en 2013. Les prévisions météorologiques des dernières semaines n’étaient pas du tout fiables. Nous avons eu bien souvent des journées de vent du sud-soleil alors qu’on nous promettait des trombes d’eau. Heureusement, en règle générale, l’erreur se produisait plutôt dans ce sens-là. Bonne surprise, mais ça rend tout de même l’organisation de nos étapes assez aléatoire.
Les nuits étant fraîches, nous avons tenté quelquefois le camping et nous sommes finalement rabattus sur les cabines avec cuisine agencée dans les campings ou encore les motels.
Pas toujours donné, mais ça permet de se faire à manger et donc de limiter les repas au restaurant. Nous avons aussi tenté les pubs qui ont des chambres toutes simples à l’étage, souvent la solution la meilleure marché dans les petites localités sans camping (et la plus proche d’une bonne petite mousse !).
Round, round, get around – I get around !
S’il y a une espèce qui n’est pas en voie de disparition sur la côte pacifique, c’est bien les surfeurs. Il y en a partout, et ils sont le public cible pour la plupart des commerces ainsi que des infrastructures touristiques et ne se séparent jamais de leur planche. C’est d’ailleurs l’objet multi-usages en particulier sur la Gold Coast : panneau de signalisation, enseigne d’hôtel, elle peut aussi servir à l’ornementation des places de jeux, comme mur de grimpe ou comme banc public.
Autre caractéristique : le véhicule – du Hummer au bus VW, ça dépend du statut social du surfeur – semble être tout entier dévolu au transport de la sacro-sainte planche et donne parfois l’impression qu’on a d’abord fixé celle-ci à une hauteur donnée sur un support imaginaire et ensuite construit la voiture dessous. A Byron Bay on croise régulièrement la version hippie : le chevelu chevauchant un vieux biclou où a été soudée une sorte de structure en fer à béton de récup’ dont l’unique usage est le transport de… allez quoi ? Vous l’avez deviné !
Le surfeur lui-même se reconnaît à des kilomètres : on ne saurait pas dire pourquoi, mais il a une dégaine qui ne trompe pas… tout est dans la gestuelle et la « cool attitude». Nous avons même voulu parier que si on mesurait les bras d’un surfeur, il y en a forcément un (en principe le droit) plus long que l’autre…
Dans tous les cas, le vent tourne et c’est l’excitation, on voit courir les vrais sportifs vers la plage, sur la route, pour ne pas louper LA vague (mais oui, celle de Point Break!).
Mais quelle n’a pas été notre surprise en voyant à proximité d’une plage un panneau « Surfers Reserve » (entre la « State Forest » et le « National Park »). Voici encore un vibrant exemple des efforts considérables consentis par les autorités pour préserver les espèces indigènes. Nous ignorions que les surfeurs étaient une espèce menacée ! Gros délire à la pensée que s’il en était des surfeurs comme des koalas, échidnés et autres dindons australiens, nous verrions fleurir les panneaux de mise en garde du style : « Do not feed the surfers » afin d’éviter de créer des déséquilibres dans leur régime alimentaire ou qu’ils perdent l’habitude et la faculté de se nourrir par eux-mêmes…
Alarmes incendies
Frédo s’est découvert une nouvelle spécialité : tester le fonctionnement des alarmes-incendies. Une fois de plus, ceux qui l’ont connu aux scouts ne manqueront pas de relever que ce n’est pas nouveau… Première cabine, premier départ d’alarme ! Au motel de Byron Bay, utilisation du grille-pain le premier matin : pas besoin que les toasts soient complètement carbonisés ; à peine un peu brunis et c’est parti. Bip criard dans les oreilles, le propriétaire débarque manu militari et, le regard sévère, lève un doigt accusateur : « You burnt the toasts ! » … ça rigole pas avec les toasts, en Australie ! Depuis, on ne les compte plus. La dernière en date, en faisant rôtir des croûtons pour la soupe à la courge à Port Macquarie. Léon a pris le pli : il court ouvrir les fenêtres dès que ça commence à bipper.
On prend le café à l’église
Fin d’étape un peu difficile le 7 juin : nous arrivons à Broadwater par la Pacific Highway avec deux idées en tête : 1° faire un pause bien méritée pour goûter et boire un jus ; 2° s’arrêter pour la nuit dans un sympathique camping pas cher (il y en a un à la sortie du village, 2 km plus loin).
Nous apercevons une très jolie église en bois à l’ancienne comme on en croise régulièrement. A y regarder de plus près, une grande pancarte plantée à côté indique « Café ». Voilà qui fera l’affaire ! A l’intérieur, nous découvrons un véritable musée : la tenancière est une passionnée de céramiques et de mobilier d’après-guerre et a recréé des pièces « à grand-maman » dans un style très « vintage anglo-saxon ». Vieilles radios, théières en porcelaine, tables en formica, tout y est ! La partie tea-room est à l’avenant. Nous entrons enchantés et tout en zieutant les gigantesques muffins et fudge cakes au chocolat du présentoir, déclarons que ç’eut été pêché de ne pas faire halte en ce saint lieu. La tenancière nous désigne le confessionnal en rigolant, mais nous déclinons l’invitation et nous rabattons sur un excellent café écolo et éthique torréfié maison. Nous bavions tellement d’envie qu’elle nous a chrétiennement offert un énorme et succulent muffin ainsi qu’un pavé de fritata (espèce de tortilla triple épaisseur au four) à l’emporter. Comme on dit par chez nous : « Quelque part, il doit y avoir un bon Dieu… » !
Les kangourous
Nous les avons cherchés dans la forêt, au bord des routes ou dans les hautes herbes, mais finalement, c’est auprès des hommes que ces charmants animaux se plaisent. Pas étonnant donc que nous en ayons la première fois repéré un troupeau d’une bonne vingtaine dans un pré au milieu des vaches. La seconde fois – la plus drôle – ce fut un face-à-face assez surréaliste : nous nous trouvions sur la Pacific Highway, le couple de kangourous sur un green de golf voisin. Ils sont restés plantés bien cinq minutes à côté du petit drapeau, les yeux rivés sur nous à se demander ce que nous fichions là. Sans accorder la moindre attention aux gentils papys qui attendaient goguenards cinq mètres derrière eux avec le club posé sur l’épaule, de pouvoir pousser la petite balle dans le trou. Ce n’est que lorsque nous avons dégainé l’appareil photo pour immortaliser le joli tableau qu’ils ont déguerpi devant ce qu’ils devaient considérer comme une arme de destruction massive…
Depuis, nous en voyons souvent, dans des jardins de particuliers, devant des supermarchés ou malheureusement, parfois en pièces détachées sur la route.
Au pays des éclopés, les koalas sont rois
Le nez en l’air, nous avons mis plus de temps à trouver les koalas… Enfin, après plus d’un mois d’Australie, à Port Macquarie, nous avons pu admirer ces charmantes petites boules de poils. Et pas n’importe où : comme nous ne faisons jamais rien comme les autres, nous ne nous sommes pas rendus au zoo, mais à l’hôpital qui leur est entièrement consacré ! Il y a de quoi faire, entre ceux blessés dans des feux de forêt, les traversées de route et les attaques de chiens. Une carte de la ville répertorie d’ailleurs au moyen de pastilles de couleurs les agressions des rex & cie sur ces inoffensives peluches grises au cours des cinq dernières années : une vraie bataille de confettis ! Pour les grands brûlés, aveugles et autres miraculés qui ont parfois survécu à plusieurs accidents de camions, des plaquettes individuelles racontent leur combat contre la mort et leur quotidien sur place. Chaque enclos – chambre d’hôpital – a un eucalyptus en son centre et lorsque les koalas recommencent à grimper au sommet pour se nourrir par eux-mêmes, cela montre que la guérison est en bonne voie. Nous avons ainsi vu deux jeunes koalas délaisser le tas de feuilles mis à leur disposition pour aller grignoter du frais au sommet de leur eucalyptus privé.
Endroit très touchant et très intéressant, tant pour les enfants que les parents. Les dons des particuliers ou les bénéfices de la boutique de souvenirs à l’entrée contribuent à financer l’hôpital.
Un peu de pédagogie (et de wifi) en bibliothèque
Depuis notre arrivée en Australie, nous profitons des jours de pluie et de pause, en particulier les fins de journées lorsqu’il commence à fraichir, pour passer un peu de temps dans les bibliothèques municipales. Nous nous y sommes également essayés occasionnellement en milieu d’étape, le temps d’une averse. Il y a systématiquement un coin enfants bien achalandé, parfois avec des jeux. L’occasion d’un petit moment lecture et pour Frédo de s’exercer pour le championnat de traduction simultanée libre de livre d’enfants. Nous en profitons aussi pour utiliser les accès internet gratuits, car il faut bien avouer que depuis notre arrivée dans le pays, les connexions sans fil en motel ou camping, c’est pas vraiment ça ! Cher et lent, ça ne fonctionne souvent pas du tout. On en vient à regretter la qualité du wifi entre deux coupures de courant à Sumatra, c’est dire !
God Save The Queen
L’Australie, ancienne colonie britannique a une population très cosmopolite aux origines les plus diverses : Brisbane a son quartier grec, Woolgoolga sa communauté sikhe… pourtant, malgré une indépendance plus que centenaire, l’Australie reste rattachée – en tout cas symboliquement – à la couronne.
The Queen’s Birthday est par exemple férié et c’est l’occasion d’un long week-end dont les dates varient d’une année à l’autre : en 2013, c’était du 7 au 10 juin. Au fait, c’est quoi la date exacte ? Qui a égaré le carnet de naissance de la petite Elisabeth ? – Le 21 avril (et cela, chaque année depuis 1926 !), comprenne qui pourra…
La plupart des toponymes donnés anciennement par les premiers colonisateurs se réfèrent à des noms de personnes ou de lieux de la métropole. Cela donne parfois lieu à de doux mélanges entre les diverses composantes Britanniques ; ainsi, nous avons séjourné à Maclean, ville qui revendique haut et fort ses origines écossaises – 4000 migrants des Highlands se sont installés dans la région après la famine de 1860. La ville écossaise se situe au coeur de la Nouvelle Angleterre (New England), dans la province des Nouvelles Galles du Sud (New South Wales)… nom d’une Picte, c’est à y perdre son Cornique !
A la rencontre des enfants… australiens
Quelques jours après notre départ de Brisbane, Lisa nous a abordés lors de notre pause pique-nique. Une habituée des voyages à vélo avec son mari, elle était très heureuse de voir qu’on pouvait voyager avec des enfants, les siens ayant respectivement 5 et 7 ans. Le courant a passé instantanément, échange d’adresses et invitation à nous rejoindre plus au sud grâce au long weekend de Queen’s Birthday. Nous lui avons donné nos prochains points de chute et toute la famille a réussi à nous faire une visite d’une journée à Maclean.
C’était trop beau pour être vrai, surtout avec un temps incertain et sachant qu’ils avaient 2 heures de route pour venir. Pourtant, Lisa, son mari Craig et ses enfants Jacob et Abi ont débarqué devant notre mini cabine pendant que nous étions affairés à la laundrette. Dans la voiture, il y avait deux caisses de jeux préparées par les nouveaux amis (qui s’imaginaient rencontrer des enfants pauvres puisque sans jeux) et de savoureux gâteaux maison. Nous étions très contents de pouvoir les inviter « chez nous » pour le tea time. Enfin… seuls les enfants ont pu s’installer à l’intérieur, faute de place ! Une journée géniale pleine de partage et de rires qui nous a bien changé notre quotidien à 4 sur le mode « vélo-dodo-vélo-dodo-repos ». Un immense merci à la famille Olsen !
Gold Coast, Nouvelle Angleterre, et maintenant ?
Mais venons-en à l’essentiel : d’aucuns se posent peut-être la question : mais où sont-ils ?
Nous avons fait notre petit bonhomme de chemin et au moment de poster cet article, nous nous offrons une petite pause à Raymond Terrace, près de Newcastle, à environ 160 km au nord de Sydney. Nous touchons donc au but. Pour en arriver là, il a fallu pas mal pédaler contre vents et marées, c’est le cas de le dire. Face à nous, le vent du sud (bon frais) ressemble à s’y méprendre à une bonne bise de chez nous: c’est froid et sec, mais en général accompagné de soleil.
Nous avons suivi les aléas de la Pacific Highway et, chaque fois que c’était possible, pris les itinéraires côtiers. C’est très varié, entre les stations balnéaires ou à surfeurs sur la Gold Coast, les localités plus bohème, comme Byron Bay.
Nambucca Heads et Port Macquarie sont aussi de sympathiques petites villes-étapes où il fait bon aller admirer aigles de mer, cormorans, pélicans et dauphins en attendant le ferry. A la nuit tombante, c’est dans un brouhaha que les cacatoès et les loriquets se réunissent tous dans le même arbre au bord de l’eau.
En règle générale, plus on va vers le sud et plus on trouve des petites villes assez sympas, autour de baies, estuaires et rivières qui découpent la côte nous obligeant à pas mal de détours. Ces derniers jours, malheureusement sous un ciel gris et froid, nous avons traversé le district des lacs au nord de Newcastle.
De Raymond Terrace, il nous reste désormais trois journées de vélo pour rejoindre le centre de Sydney. Nous allons passer quelques jours dans une famille qui nous accueille grâce à Andy, cycliste avec qui nous avons sympathisé au détour d’un méandre de rivière…
Alors forcément, un sentiment étrange nous envahit à l’approche de l’opéra. Sur nos vélos, nous chantons chaque jour nos états d’âme tantôt joyeux, inquiets, heureux, mouillés, gelés, réchauffés, rassurés.
Enfilez vos maillots et partagez en pensées les derniers kilomètres avec nous, nous nous retrouvons tout bientôt à Sydney !
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Quoi là en Australie ?
Écrit par Famille Carrard | 05/06/2013 13:16Discipline en douceur
Ouf ! Pour ne rien vous cacher, on peut maintenant avouer que prendre l’avion était un sacré stress pour nous, avec les enfants et les bagages. Certains l’auront peut-être relevé, nous n’avons pas atterri à Cairns comme il était prévu dans notre parcours initial, ceci pour diverses raisons. A savoir qu’il n’y avait pas de vol direct entre Bali et Cairns. En effet, transiter par Brisbane ou Sydney pour remonter au nord nous paraissait absurde… Notre calendrier légèrement modifié (puisque nous sommes restés plus longtemps en Thaïlande et en Malaisie) nous a aussi contraint à faire certains choix. C’est pourquoi notre parcours australien s’en est trouvé raccourci. Et heureusement pour notre bourse, car arrivés en Australie, nous devons nous réhabituer à une atmosphère occidentale et … à des prix occidentaux.
Nous nous installons pour quatre nuits au « Somewhere To Stay », l’auberge à backpackers et jeunes cools dans toute sa splendeur. Le personnel est adorable et toujours prêt à rendre service. Pourtant, avec nos vélos et nos deux loustics, nous ne faisions guère davantage couleur locale que dans les relais de camionneurs chinois, les « penginapan » de Sumatra ou les resort javanais.
Comme la vie est chère, nous nous sommes gentiment remis à popoter et dans notre pied à terre de Brisbane, utiliser la cuisine collective est au moins aussi aventureux que de traverser la Chine à vélo ou voyager une année avec des enfants. Nous avons néanmoins réussi à manger chaud (des pâtes alla Fredo) et même à y faire la vaisselle (pour ça, faut vraiment avoir le cœur bien accroché, et on la fait deux fois : avant et après !). Toutefois, nous n’avons pas pu nous résoudre à snober les bonnes petites adresses du quartier…
West End
Au premier abord, West End se différencie peu des autres quartiers résidentiels suburbains australiens, avec ses rues alignées au cordeau de petites maisons en bois peint. Une fois dans le bain, on y ressent une ambiance générale plutôt bohème : boutiques d’artisanat, boulangeries « à la française » et le café des Three Monkeys où on mange les meilleurs gâteaux des fuseaux horaires GMT+6 à GMT+9. Avec une flopée de restaurants italiens, grecs, libanais et bien d’autres, c’est un peu le quartier latin de Brisbane – sauf que c’est « rive droite » !
Nous avons vite trouvé nos marques et nos « stamms » pour les repas lorsque nous voulions échapper à l’ambiance un peu trop « cool » de l’auberge. Mention spéciale pour le Grill’d, exclusivement consacré aux hamburgers maison, sains et aux saveurs étonnantes : on reviendra juste pour le Marocco, avec steak haché d’agneau, houmos et chèvre frais ! Ambiance garantie, avec de la musique live tous les soirs par des artistes locaux dans les styles folk-rock, blues, jazz. Des kits (crayons, carnet de jeux) sont offerts aux enfants dont les oeuvres sont ensuite affichées sur le mur du couloir.
Nous avons aussi adoré le Avid Reader, un café-librairie où on peut déguster d’excellentes salades, pizzas à la citrouille et la quiche du jour, chaque fois différente (nous y sommes allés plusieurs fois pour vérifier). Là aussi, la malle aux trésors – ou plutôt aux vieilles fripes – a eu un franc succès. Le lieu par excellence où sympathiser avec les autres clients, qui viennent volontiers en famille, ou pouponner les bébés qui font mine de vouloir grimper sur les genoux de Laure, la maman poule qui s’ignore… Quelle cote-cote !
Vous l’aurez compris, nous nous sentions bien dans cette partie de Brisbane et avons eu de la peine à décoller pour aller faire notre tour cycliste de la Sunshine Coast. D’ailleurs, à part une escapade à vélo dans la City pour acheter des cartes routières et la visite des parcs au bord de la rivière pour profiter de la verdure et des places de jeux, nous n’avons pas vraiment bougé du quartier.
Idem au retour deux semaines plus tard, puisque nous avons retrouvé notre port d’attache, la vaisselle du Somewhere To Stay dans l’état où nous l’avions laissée (avec quelques couches de graillon en plus), et refait la tournée de tous nos cafés et restaurants préférés. Qu’il est bon d’avoir ses petites habitudes de temps en temps !
Tour de chauffe
Comme nous avons changé d’hémisphère, nous avons donc commencé par nous mettre en quête de chaleur en allant vers le nord. Départ à travers les quartiers et petites villes résidentielles des environs de Brisbane, puis la campagne où nous passons allégrement de réserves naturelles plantées de pins et d’une multitude de variétés d’eucalyptus aux champs d’ananas, pâturages et greens de golf. Nous optons à l’aller pour les routes de l’Hinterland.
Comme une part importante de ce tracé n’est pas touristique, c’est en recherchant des solutions pour nous loger que nous ferons de très belles rencontres les deux premiers soirs. Ensuite, étape à Landsborough où nous découvrirons la vie de « cabin » en camping (porte à cabine tout confort), sans vraiment réaliser que nous sommes prêts pour la re-sédentarisation. Puis, nous rejoindrons Eumundi, son pub et son célèbre marché.
En cinq jours de vélo, nous atteignons Noosa où nous retrouvons le monde des auberges à backpackers. Honnêtement, il nous faudra un moment pour nous sentir à l’aise dans cette agglomération de complexes hôteliers et de boutiques de luxe. Au détour d’une virée à vélo, nous tomberons néanmoins sur un petit bijou de café, le Café Noisette, tenu par François, un fringant jeune papa français avec qui nous sympathisons immédiatement, le temps de savourer un délicieux brownie.
Noosa, c’est surtout une réserve naturelle offrant de fabuleux coups d’œil sur l’Océan pacifique, des criques aux noms exotiques ou qui donnent des frissons « Hell’s Gates » où viennent s’écraser des rouleaux attirants les surfeurs du monde entier. Au loin, on devine dans les vagues azur le ballet des dauphins.
Quant à l’estuaire et aux lagunes qui ont pour l’instant réchappé au bétonnage urbain, ils servent de lieu de réunion aux nuées d’oiseaux qui se rassemblent le soir dans un tintamarre indescriptible, alors que de placides pélicans viennent squatter la plage en attendant que les pêcheurs leur distribuent les rebuts de leurs prises, préparées sur place.
Nous redescendons au sud par la « Sunshine Coast ». Pendant des dizaines de kilomètres, c’est une suite ininterrompue de plages où viennent s’écraser d’impressionnantes vagues.
C’est beau, mais il fait un vent sec à édenter les crocodiles, de face bien entendu, et même les descentes fatiguent les mollets.
Après un retour à l’intérieur des terres qui nous oblige à reprendre un bout la route de l’aller entre Landsborough et Caboolture, nous rejoignons la côte à Redcliffe, sur la Baie de Moreton où nous rechargeons les batteries, après une étape interminable, dans un appartement de vacances tenu par un couple à la bonne humeur et à l’enthousiasme communicatifs lorsqu’ils nous voient débarquer avec notre barda.
Pour retourner sur Brisbane, nous pourrons suivre des itinéraires cyclables qui traversent parcs, tourbières et mangroves sur de petits pontons en bois, sous un ciel changeant. Drôle de mise au vert qui nous fait faire 53 km au lieu de 32 pour rejoindre la centre du chef-lieu, mais où nous croisons encore un cyclo anonyme qui a comme nous traversé le Vietnam, le Cambodge… En Australie, il faut vraiment quitter la route et faire des détours pour avoir la chance de croiser des deux-roues.
Nouvelles difficultés
Après la claque des prix élevés, celle des températures fraiches… Car le froid s’est invité plus vite que prévu à Brisbane. A la grande surprise des locaux, d’ailleurs. Dans cette région subtropicale, on est passé sans transition d’un temps de mousson équatoriale à l’hiver austral, la semaine avant notre arrivée. Nous avons donc vite ressorti nos polaires, coupe-vent, chaussettes et sous-vêtements longs. Après notre première nuit sous tente – merci Karen pour la couverture – nous avons revu à la baisse nos projets très optimistes de faire majoritairement du camping… et nous nous sommes dépêchés de trouver des doublures pour nos sacs de couchage d’été.
Un autre constat s’impose : sur la carte, l’Australie a l’air très plate… eh bien pas du tout ! Même la bande côtière du sud Queensland est passablement bosselée et au niveau des tracés routiers, nous ne rompons pas vraiment avec les habitudes prises ces derniers mois, au point qu’on se demande sérieusement si les Australiens n’ont pas engagé spécialement des ingénieurs indonésiens pour construire les routes. Lorsqu’il y a une belle plaine toute plate avec une seule colline au milieu, la route se doit de passer sur celle-ci, au droit ! Nous qui pensions qu’après l’Indonésie, rouler en Australie, ce serait les vacances, nous devrons revoir un peu notre jugement.
Autre désagréable surprise : en milieu campagnard, les conducteurs – en particulier les jeunes rednecks conduisant camions ou pick-ups – détestent tout ce qui pourrait s’apparenter à un obstacle sur la route (ils ont d’ailleurs de puissants pare-buffles). On nous fait donc bien comprendre que nous ne sommes pas les bienvenus : queues de poisson, visages grimaçants ou attitudes insultantes, coups de klaxon rageurs, beuglements dans nos oreilles et dépassements serrés alors que les deux voies sont libres et qu’il y aurait bien la place de prendre au large… Inversement, rouler dans les grandes villes est assez peu stressant, grâce à la présence généralisée des bandes cyclables et à un comportement plus civilisé des usagers de la route.
Rencontres
Depuis notre arrivée en Australie, nous avons fait plein de rencontres sympas, que ce soit à Brisbane dans nos « stamms » ou sur la route. A peine débarqués à Brisbane, Stuart nous a accueilli à l’Avid Reader comme si nous faisions partie de la famille ; au même endroit, nous avons rencontré Kelly et Nina mises en contact avec nous par une amie depuis Bali. Un autre jour, toujours à l’Avid Reader, la petite Betty a flashé sur Laure et n’a pas décollé de ses genoux jusqu’à la fin du gâteau aux carottes, sous l’œil amusé de Sarah, sa maman.
En route pour Noosa, nous avions un peu l’impression d’être observés, en remarquant toujours la même voiture arrêtés sur le bord de la route, jusqu’à ce que Kerstin, jeune mère de famille, ne nous aborde à une station-service (mais que peuvent bien faire des cyclos à une station-service… ?) : « Why do you do that ? » sur un ton presque de reproche, avant de faire une demi-heure de sympathique causette… Fin de journée à quelques kilomètres de là, nous commençons à désespérer de trouver un endroit pour planter la tente (cela ne vous rappelle-t-il pas plusieurs de nos articles ?). Un grand bonhomme un peu nounours en tenue de course passe avec son chien : Ray habite à 200 m de là – juste avant la grosse montée – et nous propose de camper dans son jardin. Son épouse Lorraine et lui-même se préparent à voyager un mois à vélo en Europe l’automne prochain.
Finalement, nous dormirons au chaud, DVD de Shrek et grosse caisse de legos pour les enfants, apéro et dégustation de vins australiens pour les parents et barbecue d’agneau pour tout le monde devant un bon feu de cheminée. Divin ! Le lendemain matin, Lorraine nous accompagnera encore une vingtaine de km à vélo. Merci les amis !
Rebelotte le soir suivant : pas l’ombre d’un camping, nous abordons des locaux et nous retrouvons dans un jardin en pleine cambrousse (on ne sait même pas le nom de la localité). Ray (pas le même qu’hier – est-ce que tous les Australiens s’appellent Ray ?) et Karen nous mettent à dispo le jardin et nous squattons allégrement leur grande maison pour la soirée entre la cuisine, les sanitaires, la TV et – comme les nuits sont fraiches – un peu de literie dans la tente.
Gentillesse, générosité, nous repartirons le lendemain avec un sac de succulents petits légumes jaunes qui ressemblent à des pâtissons et la possibilité de loger au retour.
Mais où sont les koalas et les kangourous ?
Petite déception pour les enfants en l’état : nous nous attendions à croiser quotidiennement des marsupiaux en tous genres, en particulier des koalas et des kangourous. Pour l’instant, à part l’opossum qui squatte le jardin du Somewhere To Stay et ses congénères aplatis sur les routes, c’est un peu maigrichon ! Bien sûr, il existe plein de parcs d’attraction et de zoos où on peut les voir, les toucher etc… mais franchement, en Australie, nous ne voyons pas vraiment l’intérêt d’aller voir en captivité des animaux indigènes que nous pourrions par ailleurs admirer dans tous les zoos du monde… Nous nous consolons avec les oiseaux et là c’est l’éclate : ibis, dindons australiens, loriquets aux couleurs vives, cacatoès et pélicans font partie de notre quotidien.
Encore 1000 km !
C’est pas tout d’aller se pavaner au nord à la recherche du soleil : Brisbane-Sydney, c’est 950 kilomètres par le chemin le plus court : une autoroute que nous avons envie de voir le moins possible. Nous mettons donc le cap plein sud le 30 mai pour… euh… c’est déjà quoi l’adresse Dory ? – « P. Sherman, 42 Wallaby Way, Sydney ».
Sydney ? ouéééé, c’est là qu’on va ! alors on arrête d’écrire des bêtises sur internet, et on fonce. Et sans prendre la baleine !
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Bali, on revit !
Écrit par Famille Carrard | 23/05/2013 11:58Bali, rien que le nom fait rêver ! Sans doute l’endroit qui occupe l’une des premières places dans les prospectus touristiques… mais qu’est-ce qui pousse tant de monde à aller passer ses vacances sur cette île perdue au milieu de l’Indonésie ? Ça titille un peu la curiosité, pas vrai ?
Pourtant, nous avons failli zapper cette étape, car l’Indonésie est définitivement un pays trop grand pour être visité en 60 jours, surtout à vélo ! Mais nous nous devions d’aller vérifier, raison pour laquelle – entre autres – nous avons donné un grand coup d’accélérateur à notre traversée de Java.
Arrivée donc à Bali en ferry le 30 avril pour deux toutes petites semaines. Les changements de décor et d’ambiance se font très rapidement sentir : les mosquées sont remplacées par les temples hindous et les « Hello Mister » criards se font plus rares. En arrivant par l’ouest, on a vraiment le sentiment que ce petit bout de terre est oublié du monde, mais cette impression va très vite disparaître, à l’approche des zones touristiques…
Un peu de culture balinaise
Une forme originale d’Hindouisme – encore fortement teintée de vieilles croyances animistes – est pratiquée sur l’île depuis un millénaire. C’est la principale spécificité de Bali, par rapport au reste de l’Indonésie, pays majoritairement musulman avec d’importantes minorités chrétiennes. Si la structure sociale en castes propre à l’Hindouisme est encore vivace, elle reste peu perceptible à l’étranger de passage. C’est surtout lors des cérémonies religieuses que l’appartenance sociale prend toute son importance. En toute occasion, les Balinais portent encore volontiers le costume et pas uniquement les jours de fête. Devant chaque maison se dresse un temple domestique, souvent imposant et très beau. Il est d’ailleurs parfois plus grand que l’habitation elle-même. Devant l’entrée, les « penjor » (de longues hampes en bambou orné et portant un petit casier à offrandes) se courbent par-dessus les routes et semblent saluer les passants. Enfin, à des heures précises de la journée, de multiples et très jolies petites offrandes sont déposées dans les temples, les autels domestiques et – de manière plus étonnante – sur les lieux de passage : seuils, entrées de garages, trottoirs pour se protéger des mauvais esprits…
Les enfants retrouvent de vieux amis : dragons et tigres, Ganesh et tous ces personnages avec plein de bras, ainsi qu’une multitude de divinités anonymes vues du Vietnam à la Malaisie qu’Hindous et Bouddhistes se prêtent volontiers. Autant Eugénie et Léon aiment piquer des fleurs sur les arbres, autant ils ne saccageraient pas une offrande. A l’inverse, ils prennent bien soin de passer à côté et de sermonner leur papa qui, maladroitement, les piétine !
La côte nord
Pour changer de Sumatra et Java, nous commençons par une jolie petite route presque plate et bordée d’arbres. Il fait bon, pas de moustiques à l’horizon et la circulation est fort raisonnable. Une première étape dans un homestay flambant neuf, charmant où nous testons notre première chambre avec WC et douche en plein air : un concept très à la mode !
La seconde étape dans un environnement campagnard nous mène à Lovina, station balnéaire où la chasse au touriste est un véritable sport pour les locaux. Il faut dire qu’hors saison, l’offre en magasins de souvenirs, restaurants à spécialités de poisson, bars et excursions pour voir des dauphins dépasse largement la demande. Nous passons trois nuits dans un petit hôtel à bungalows au milieu d’un grand jardin avec piscine.
On rencontre des Québécois, palisse !
Nous faisons la connaissance d’une famille de Québécois en route pour 6 mois et avec qui nous sympathisons immédiatement. A peine arrivés, Manon et Sylvain nous convient aux cinq ans de leur fils, pour le plus grand plaisir des enfants. Excellente entente entre Léon, Eugénie et Zachary, même si Léon trouve que son nouveau pote au nom difficile à prononcer (nous avons entendu « Safari », « Zafari », « Jacques-a-dit ») a une drôle de façon de parler. Pendant deux jours, le trio s’en donne à cœur joie entre piscine et plage de sable noir (volcans obligent !). Nous passons d’excellents moments et dégustons ensemble des spécialités balinaises dans notre cantine de Lovina, le petit bistrot tout simple qui fait la nique aux restos branchés du bord de mer.
Au moment de repartir, la séparation est difficile. Petit moment d’émotion et nous nous promettons de nous revoir au Québec ou en Suisse !
Nous nous relançons néanmoins sur les petites routes vallonnées menant à Singaraja, traversons les quartiers de pêcheurs longeant la mer avant de poursuivre par une grosse étape côtière jusqu’à Tulamben. Arrivés de nuit dans un hôtel (et plus largement, une station touristique) consacrée à 100% à la plongée sur les récifs coraliens et l’épave du Liberty (un navire américain coulé par les Japonais), nous ne nous sentons pas vraiment à notre place ici (un peu comme un courtier en assurances libéral parachuté dans une fête d’archéologues). Nous poursuivons donc dès le lendemain vers l’est, quittons la route principale de Denpasar pour aller explorer la région d’Amed à l’atmosphère beaucoup plus bohème que Lovina. Malgré la difficulté du parcours, le charme opère rapidement. Tellement rapidement que nous nous arrêtons à Bunutan, l’un des nombreux villages d’Amed après une étape de… 17 km qui nous a déjà bien usé les mollets.
Un nouveau coin de paradis
Car c’est là que nous avons trouvé notre bonheur : le Double One, petit hôtel composé d’une dizaine de bungalows agrippés dans une pente escarpée. Depuis notre très belle chambre (la catégorie « économique » se trouve tout en haut), nous avons une plaisante vue sur la mer.
Pour savourer d’excellents petits-déjeuners et profiter de la piscine, il faut par contre se rapprocher de la plage et descendre des marches de géants. Mieux vaut ne rien oublier avant de se lancer dans la descente, car la remontée est costaude même pour les plus sportifs (d’ailleurs, il n’y a aucun rondelet dans le personnel…) !
Pour un peu, on s’installerait ici jusqu’à la prochaine mousson, ou celle d’après, à l’image de Sophie, arrivée il y a six mois et qui – pas pressée de quitter l’endroit – aide à la bonne marche de l’établissement…
Pendant que les enfants barbotent dans la piscine, nous observons amusés quelques « pêcheurs » aux biscotos musclés qui se pavanent sur la plage, espérant emmener les touristes faire du snorkeling dans les coraux ou vendre à prix d’or leurs cerfs-volants.
La côte est
Nous avons toujours en ligne de mire l’échéance de notre visa et surtout, notre vol pour Brisbane la nuit du 12 au 13 mai… avec tout ce que cela comporte d’organisation logistique ! Nous quittons donc ce petit paradis après un – trop court – jour de pause.
Sans que ce soit une véritable surprise, nous allons vivre ce jour-là l’un des plus gros défis sportifs de notre voyage (et il y en a eu !). Sur le papier ou sur google maps, rien d’effrayant, le point culminant étant environ 300 m au-dessus du niveau de la mer. Avec les montées et descentes successives, on peut estimer la dénivellation cumulée des montées du jour à 700-800 mètres. Là encore, nous avons vu pire à plusieurs reprises tant en Chine qu’au Vietnam, au Laos, ou encore à Sumatra. Sauf que cette fois, nous serons en pleine fournaise, avec un taux d’humidité de forêt tropicale et surtout, des pentes impressionnantes, au point que nous nous sommes parfois demandés quelles machines ils utilisaient pour goudronner les routes…
Une fois dépassé le dernier hôtel, les aléas de la route nous mènent à des belvédères avec coups d’œil plongeants sur les criques azur et les villages de pêcheurs. Mais à chaque virage sur une bosse, le suspense: est-ce que ça redescend ? Parfois oui, d’autres fois, c’est un kilomètre de montée droit dans la pente qui donnerait froid dans le dos au montagnard le plus chevronné…
On met pied à terre et ho-hisse (cenovis)! Léon a bien pris le pli de faire l’ascension à pied, mais c’est plus difficile pour sa sœur. On la comprend : c’est plus confortable à l’ombre dans la remorque.
Les chaussures de Frédo, mises à mal par plusieurs mois de poussage rendent l’âme définitivement. Si les coutures laotiennes de la droite ont bien résisté, en revanche toute la partie centrale de la semelle a entièrement disparu : les clips ne tiennent donc plus en place que par la présence du pied, ce qui n’est pas top pour remplir leur fonction…
L’avantage d’avancer lentement est que nous avons le temps de sympathiser avec les locaux et de nous faire inviter pour le café sur un chantier de construction.
Pour le repas de midi, pas l’ombre d’un « warung » (petit resto local indonésien) ; en apprenant qu’il n’y a rien les 10 prochains kilomètres, Laure se résigne à demander de la nourriture à une modeste famille contre quelques dizaines de milliers de roupies. Heureusement, celle-ci accepte. Au menu : riz, sardine, thon (garanti local) et un petit choix de pâtisseries maison. Miam ! Ambiance sympa, les enfants du voisinage viennent s’asseoir calmement autour de nous et observent ces drôles de blancs qui ne font pas cette route pleins tubes en 4×4, pour une fois.
Partis vers 9h00, nous avons fait 18 km à 15h00 sur les 53 que compte l’étape. Mais nous avons repris des forces, ce qui nous permet de gravir la dernière grosse montée avant de redescendre vers la mer du côté d’Amlapura. Les jambes et les bras en compote, nous arrivons enfin sur des routes normales (pas plates, mais avec des pentes normales…). Nous traversons des rizières, un petit col, la station balnéaire de Candidasa pour finalement finir de nuit à Padangbai, ville côtière d’où partent les ferries pour Lombok.
Nous dénichons un hôtel avec d’étonnants cottages à toit de bambou en duplex et un bon restaurant servant du steak de barracuda : allez, après une étape pareille, on peut bien se faire plaisir ! Tous les quatre à moitié endormis sur la table, c’est le ballet des serveurs en train de boucler le resto qui nous poussera à bouger nos fesses jusqu’à notre lit…
Le lendemain, départ pour une dernière étape. Ce n’est qu’en sortant de l’hôtel que nous prenons réellement conscience de la dimension touristique de l’endroit : des milliers d’Occidentaux blancs comme des linges ou rouge écrevisse débarquent en masse de cars pour s’amasser au départ des ferries. Du coup, aucun regret de ne pas nous attarder plus longtemps ici. L’étape du jour nous mène à plat, à travers les rizières, avec quelques beaux coups d’œil sur la côte.
Après un arrêt près d’une plage, nous terminons sur des grands axes peu sexys, directement à Sanur, ville balnéaire située juste à côté du chef-lieu Denpasar.
Si rester plusieurs jours dans un secteur aussi urbain et touristique n’est pas l’idée qui nous réjouit le plus, en revanche, nous savons que c’est indispensable pour préparer au mieux notre départ avec les vélos.
Sanur car thons, pi Scott ?!
Quatre jours, c’est le temps que nous estimons suffisant pour nous assurer à l’aéroport de Denpasar que tout est OK pour que nous puissions transporter les vélos. Devant l’incompétence des employés d’agences de voyage indonésiens, nous avons en effet dû nous résoudre à réserver les vols en ligne, ce qui n’est évidemment pas idéal lorsque l’on ne voyage pas avec le paquetage standard. Surtout, il faut trouver des cartons, démonter et nettoyer vélo, tandem et remorque, tout emballer selon des mesures bien précises et conditionner l’ensemble de notre caravane. Le jeudi 9 mai, en cherchant un magasin de vélo, c’est devant les enseignes fermées que nous prenons conscience que l’on a beau être à Bali, en Indonésie, l’Ascension, c’est férié ! … et un jour de perdu, un!
Tout est donc remis au vendredi, avec plus de succès, puisque nous trouvons un magasin suffisamment complet, au personnel sympathique et compétent ; nous y allons à vélo, nos engins sont démontés et nettoyés, mis dans les cartons laissés ouverts et rapatriés en camionnette à notre hôtel. Ouf ! y’a plus qu’à … tout ressortir, renforcer le carton du tandem (bricolé à partir de deux cartons à vélo standards), jouer à tetris avec les différentes pièces détachées pour arriver pile poil au poids juste, avec l’aide de la vieille balance mécanique de l’hôtel… et ensuite faire la même chose avec toutes nos sacoches. A devenir maboule !
Le reste du temps sera consacré à la natation et à enseigner à Léon et Eugénie l’art de fermer la bouche quand on leur met la tête sous l’eau, faire des châteaux de sable, enrichir nos connaissances en matière de gastronomie indonésienne et balinaise, acheter des souvenirs, organiser le transport jusqu’à l’aéroport et notre arrivée à Brisbane, trier et jeter nos vieilleries, remplacer chaussures de vélo, tongs et maillots de bain défaillants…
En définitive, nous avons réussi à traverser Bali sans faire une seule des visites, ou attractions habituellement proposées aux touristes.
Trop fort ! Mais nous avons au moins vu la vraie vie des petits villages traversés à vélo, entretenu les biscotos, bu le café assis par terre, acheté des cerfs-volants et mangé toutes sortes de poissons… Pis surtout, c’est beau!
Aussie avec nos vélos
Dimanche 12 mai au soir, embarquement pour l’aéroport. Nous y sommes largement en avance – vers 20h00, alors que le vol est à passé minuit – par crainte de devoir réorganiser l’emballage de nos véhicules ou passer le tandem en fret (ça marche comment ? Euh… aucune idée) à la dernière minute. Afin d’éviter le même genre de gag que nous avions rencontré à Cointrin (cartons complètement ramollis par la pluie et défoncés par le personnel du tarmac) et de peaufiner l’apparence esthétique de nos vieux cartons, nous décidons d’investir 30 dollars d’emballage cellophane…
Victoire, tout passe la rampe et le tandem de 32 kilos est pesé à 21, suite à une erreur de balance, ce qui nous évite de payer la taxe de surpoids de 60 dollars. Finalement, tout s’est bien passé, la seule véritable galère ayant été d’occuper les enfants pendant les quatre heures passées à l’aéroport de Denpasar…
Arrivée à Brisbane le 13 mai au matin, aussi frais et dispos que des opossums du Queensland. Soulagement, tous nos bagages ont suivi !
Dis Freezy sharky, quels seront les nouveaux défis dans cet immense pays ? Let’s see…
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Java bien, et vous ?
Écrit par Famille Carrard | 09/05/2013 12:26Il n y a pas que les crapauds et les pélicans qui voyagent. La caravane des cyclos en goguette a fait son petit bonhomme de chemin, avouons-le, avec pas mal de bus.
Java est une île de 128’000 km2, trois fois la Suisse mise bout à bout, pour 136 millions d’habitants (17 fois la Suisse). Autant dire que la densité de population et la circulation sont à l’avenant et que les abords des villes ne sont pas vraiment un paradis du cyclisme. D’ailleurs, le trafic sur les grands axes et dans les secteurs urbanisés et industrialisés offre un spectacle dantesque aux heures de pointe. Nous avons donc été bien inspirés de tout faire pour éviter Jakarta. Le gag, c’est que comme pour tout Indonésien, il est impensable de se trouver dans le pays sans être passé, arrivé ou sans devoir repartir par la capitale, on nous demande toujours, où nous allons après Jakarta, ou si on vient directement de Jakarta, si nous pensons arriver ce soir à Jakarta ou plutôt demain… Bref ! Pour nous, la réponse c’est « Jakarta tidak ! ».
Retour au 18 avril
En arrivant de Merak, nous avons donc directement effectué un crochet par la côte ouest. Les premiers kilomètres, nous nous demandions vraiment ce que nous étions venus faire dans cette galère, la route étant particulièrement chargée en fin d’après-midi entre Cianjur et Anyer, où camions, minibus, voitures et motos semblaient se disputer la pole position. On a intérêt à tenir sa gauche et à être prêt à freiner. Entre autres galères, perte de notre second compteur (arraché le matin même des griffes d’un vilain bonhomme). Cette fois-ci, il faudra vraiment compter les bornes – c’est le cas de le dire – à l’approche des 10’000 km.
Le jour suivant (après Anyer), la route côtière sera miraculeusement quasi déserte ; petite étape tranquille au bord de la mer jusqu’à Carita où nous tentons le resort un peu plus luxe que d’habitude et où nous croiserons la route de Bruno le crapaud. A partir de Lubuhan, estimant que Jakarta a été suffisamment contournée, nous poursuivons en direction de l’est, remontant sur les plateaux entre les volcans jusqu’à Pandegelang avant de viser Bogor.
Le 21 avril, nous nous levons tôt pour une ultime étape de vélo. La barre des 10’000 km est franchie sans chichi (dans tous les sens du terme…) après un rapide petit déj’ et une demi-heure de route. Nous enchaînons les kilomètres, profitant de la fraîcheur matinale.
Comme tout ça donne faim, on fait un brunch de mi-matinée à grands renforts de poulet, riz et croquettes de patates, histoire d’avoir du jus pour la suite. Car Java, c’est « malplat » ! Pendant une cinquantaine de kilomètres, nous nous trouvons de nouveau en pleine cambrousse, sur une route qui d’abord suit la ligne de crête avant d’enchaîner avec une nouvelle série de vallées en enfilade en effectuant d’incroyables détours. C’est joli, mais peu ombragé, à part lorsque nous longeons des palmeraies sur des versants sud… tout ça donne soif aussi et nous faisons le plein à chaque fois que l’occasion se présente.
En fin d’après-midi, nous sommes encore à une bonne cinquantaine de kilomètres de Bogor, il y a de nouveau des petites villes, mais complètement hors des circuits touristiques sans un seul logement. Nous nous résolvons donc au plan B : l’auto-stop camionnette. Le premier essai est le bon et nous nous faisons livrer avec armes et bagages directement au centre de Bogor, sur le pas de porte d’un guesthouse. Comme toujours, à l’approche de la ville en fin de journée et déjà dans les quelques cités de banlieue couvrant la fin du parcours, une circulation épouvantable et complètement anarchique prévaut. Pas de regrets donc d’avoir ménagé un peu nos jambes et nos jantes, d’autant que la moitié du trajet aurait été passablement accidentée, poussiéreuse et sur une route défoncée.
Bogor
Bogor, une drôle de ville, près d’un million d’habitants à une soixantaine de kilomètres au sud de Jakarta. D’un point de vue urbanistique, les quartiers récents tirés au cordeau se développent à l’est du centre, alors que la partie ouest entre bidonvilles, gare et golf luxueux est sans queue ni tête. A l’abord de l’une des rivières traversant la ville, les maisons des quartiers populaires ont d’ailleurs tendance à tomber dans le ravin sapé par les fluctuations du cours d’eau.
La particularité du centre « historique » est qu’il ne s’agit pas d’une vieille ville avec des bâtiments coloniaux. Le véritable cœur de Bogor est le Kebun Raya : il s’agit d’un gigantesque jardin botanique de plus d’un kilomètre carré (4 fois le Jardin du Luxembourg à Paris !), avec zones de parc et palais. Originellement destiné à l’étude des plantes tropicales, il a gardé en partie cette vocation : la majeure partie est aujourd’hui ouverte au public et comme zone de détente, fait le bonheur des écoliers, des visiteurs étrangers et de tous les amateurs de verdure et d’environnement romantique.
Malgré son importance, la ville est délaissée par le réseau de transports. Pourtant en bonne place sur la voie ferrée qui relie l’ouest à l’est de Java, c’est devenu une gare cul-de-sac. Le prolongement sud de la voie est désormais condamné par une grille et squatté par des marchés et un nouveau parc qui semble peiner à s’imposer comme tel, à en croire le nombre de bistrots fermés. La gare n’est plus desservie par les directs et on doit donc aller sur Jakarta pour reprendre un train traversant la ville (mais pas la gare) si on veut se rendre dans l’est de l’île : tant pis, nous avons juré nos grands dieux depuis bientôt 10 mois que nous n’irions pas à Jakarta et nous n’irons pas ! Pour aller à Yogyakarta, nous devrons donc une fois de plus nous résoudre à prendre un bus.
Minibus privé, un luxe ?
La croix et la bannière pour relier Bogor à Yogya en transports publics : c’est ce qui nous attendait, à en croire le Lonely Planet (ou plutôt l’étonnante absence d’informations) et la tenancière de notre guesthouse. C’est donc sur son conseil que nous avons pris un bus privé « door to door », le double du prix des bus publics avec les vélos. La dame nous a tout organisé et s’est sucrée au passage d’une confortable commission. Bref, nous embarquons avec nos vélos démontés dans un minibus sept places (la moitié des sièges enlevés) et en payons six. Le trajet lui-même est intéressant : de Bogor à Bandung, c’est une imposante montée qui mène au sommet du col de Puncak (1400 m.) sans discontinuer dans un trafic impressionnant : nous sommes sur l’un des deux principaux axes est-ouest de Java. Si l’on fait abstraction des camions qui serpentent pare-choc contre pare-choc entre les innombrables épingles à cheveux du col, les paysages rappellent un peu ceux des Cameron Highlands en Malaisie avec des kilomètres carrés de plantations de thé dessinant d’étonnants labyrinthes à perte de vue dans des pentes impressionnantes. Resdescente sur Bandung pendant le rush de la nuit tombante avant de retrouver voies rapides et routes de plaine avec des traversées de villages et de villes à des vitesses qui font froid dans le dos…
Encore un trajet annoncé comme devant durer 15 heures, mais c’est nous qui le ferons prolonger en intimant l’ordre à notre chauffeur de dormir un moment : voyant dans la soirée qu’il faisait des trucs bizarres sur la route et qu’il n’avait plus l’air très frais, nous lui avons imposé trois heures de sommeil dans une station service, quitte à arriver plus tard. Résultat des courses : de quinze heures, nous sommes passés à 20 heures de trajet. En discutant avec lui, les chauffeurs n’osent d’habitude pas s’arrêter à part pour les pauses repas car ils ont de gros soucis avec les clients pour le moindre retard : promis, nous ne nous plaindrons pas du retard, trop heureux d’être arrivés en vie à destination… C’est le paradoxe : on prend le service plus cher que les bus de ligne, dont les deux chauffeurs roulent en alternance. Du point de vue de la sécurité c’est discutable !
Dès le petit matin, la voiturée émerge peu à peu en même temps que la vaste plaine qui s’étire entre Purwokerto et Yogya. Tranquillisés après les inquiétudes de la nuit – le chauffeur s’offrira encore une petite sieste après le petit-déj’ – nous pouvons apprécier à sa juste valeur le magnifique spectacle des rizières qui s’éveillent dans les brumes matinales. Tandis que les « chapeaux pointus » s’appliquent à repiquer le riz au pied des volcans, les pères et grands-pères de famille amènent les enfants à l’école par demi-douzaines dans leurs « becak », les rickshaws javanais. Nous sommes tout de même soulagés de débarquer au Bladok Hotel sur le coup de midi. C’est là que nous allons nous remettre de nos émotions quelques jours avant notre dernière grande virée en bus indonésienne.
Yogyakarta
« Jogja » pour les intimes ! Cette ancienne capitale entourée de sites culturels et naturels prestigieux (Borobudur, le volcan Merapi) présente tous les attraits d’une ville touristique. Monuments à visiter, artisanat, vie culturelle. Calèches et becaks font partie intégrante du paysage urbain et sont à l’usage tant des touristes que des locaux. A chaque fois que nous franchissons le seuil de notre hôtel, nous voilà hélés par les conducteurs de becaks à coups de sonores « transport ! » ; ils nous emmèneraient au bout du monde ou de la rue, c’est selon. C’est d’ailleurs dans un éclat de rire général – les Javanais ne manquent heureusement pas d’humour et ont le sens de l’auto-dérision – que nous leurs renvoyons l’invitation en passant avec nos tandems et vélos à remorque.
Nous nous retrouvons donc quelques jours en immersion au milieu des touristes, guesthouses, hôtels, services de « laundry » (orthographes multiples), « tourist information » (agence organisant des tours organisés ou des minibus vers d’autres destinations touristiques) et restaurants indo-western. Nous nous accorderons d’ailleurs de nombreux écarts culinaires, ce d’autant plus que les équipes de cuisine, tant du Bladok que du Bedhot proche, sont rodées au mélange des styles. Yogyakarta sera donc probablement l’endroit où nous nous serons un peu remplumés après Sumatra et le début de Java.
Pour les courageux (ou les enragés), nous sommes dans la ville du shopping-souvenirs. La rue Malioboro est vendue entièrement au batik (technique d’ornementation des textiles à la cire perdue) et surtout à tous ses dérivés. Si on veut faire de bonnes affaires, il faut s’y connaître un peu et se lever de bonne heure. Nous nous contenterons d’une unique escapade dans un grand magasin de batik et de souvenirs pour voir ce que c’est, avant de déserter les Champs-Elysées de Yogya.
En matière de culture, nous aurons visité le Kraton (palais du sultan) dans la cohue, le Taman Sari (château d’eau, très joli !) et ses échoppes d’artisanat pour les touristes. Honnêtement, c’est surtout les trajets en becak ou à pied dans les ruelles adjacentes ou les balades à chercher notre chemin dans les kampungs et les arrière-cours qui nous auront le plus marqués.
En soirée, nous avons tenté le spectacle de marionnettes en ombres chinoises ; pas top avec les enfants : après une demi-heure de présentation des personnages, deux heures de descriptif détaillé du combat titanesque des figures légendaires héritées du vieux fond culturel hindou. C’est de l’épopée dans le style homérique, mais en javanais! Apparemment, il y a très peu d’Occidentaux qui tiennent jusqu’à la fin du spectacle… au moins, nous aurons vu comment sont fabriquées les marionnettes dans de la peau de buffle.
En guise de sortie des quartiers touristiques, nous nous sommes offerts des allers-retours à la gare des bus. L’occasion de faire une quinzaine de km à vélo en périphérie et de voir les quartiers au sud du Kraton s’animer à la nuit tombante.
En définitive, ce qui aura le plus marqué les enfants lors de notre unique stop javanais, outre les merveilles cuisinées au restaurant de notre hôtel, c’est surtout le fait de pouvoir sauter quasiment directement de notre chambre dans la piscine… et on peut dire que celle-ci a été largement rentabilisée !
Recette pour « alléger » sa chevelure en voyage…
Mais la pause à Yogyakarta a aussi été un arrêt utilitaire. Il s’agissait pour nous de régler la question de nos billets d’avion de Denpasar (Bali) à Brisbane (Australie), ce qui n’était pas une mince affaire. Incompétence des agences de voyage à réserver des vols dès que l’on sort du cadre du touriste moyen standard avec sa valise standard ; mauvais fonctionnement des systèmes de réservation en ligne (et d’internet en général). A l’heure où nous postons cet article, nous n’avons d’ailleurs toujours aucune certitude que le 13 mai, nous pourrons bien embarquer dans l’avion avec nos vélos, remorque et tandem. Prises de tête également (comme à Bogor) pour trouver le moyen le plus simple et le moins coûteux de relier Yogya au ferry pour Bali, avec éventuellement une escale au fameux volcan Bromo. Autant dire que nous avons fait une croix sur le volcan pendant qu’il nous restait encore quelques cheveux (y compris et surtout à Laure ; pour Frédo ce n’est plus d’actualité…).
Donc un bus de nuit pour 14 heures de trajet entre Yogyakarta et Banyuwangi, ville la plus à l’est de Java et départ du ferry pour Bali. Trajet sans histoire, de nuit, avec un chauffeur ni plus, ni moins taré que les autres conducteurs de bus indonésiens. Et comme à chaque fois, repas éparpillés sur la nuit, réveil un peu courbaturé au petit matin en extase devant volcans et rizières au lever du soleil. Franchement on se lasse des trajets en bus, mais pas des paysages javanais. Arrivés le 30 avril à 7h00 pétante au terminal de Banyuwangi, nous nous dépêchons de revisser tous les boulons de nos véhicules et engloutissons un dernier petit-déjeuner javanais avant de parcourir les dix derniers kilomètres qui nous séparent du ferry. Bali, nous attend !
Ça balance pas mal à Bali, ça balance pas mal !
Et voilà que nous la quittons déjà sans même vous avoir raconté notre très beau séjour balinais tout en vélo et en merveilles… Car d’ici quelques jours, nous vous saluerons depuis l’Australie (avec ou sans nos bagages !). Promis, la séance rattrapage est prévue avant l’été !
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Plus fort que la fiction !
Écrit par Famille Carrard | 27/04/2013 10:34Depuis le début du voyage, les histoires du soir – réalistes, cela va de soit – sont improvisées à mesure sous la forme de feuilletons. Elles mettent en scène des animaux, doués de raison, dont le chemin croise parfois celui d’autres aventuriers, une certaine famille de fous à vélo voyageant avec deux enfants à travers l’Asie… et c’est là que la réalité rejoint la fiction !
Nous dédions ce petit texte aux jeunes lecteurs qui ont peut-être envie de percevoir notre périple par l’autre bout de la lorgnette…
Les (més)aventures de Bruno le crapaud
Si vous avez raté le début…
Bruno le crapaud aime l’inconnu et veut découvrir le vaste monde. Parti le mois dernier de l’arboretum d’Aubonne en Suisse avec son amie Aude (la Crapaude), il voyage à bord d’Ivan le Pélican, un autre aventurier passé là par hasard qui veut rejoindre Sydney. En ce moment, les trois compères traversent l’Indonésie et posent patte à terre au gré de leurs envies et des inévitables péripéties qui rythment leur périple.
L’histoire se passe un week-end d’avril à Carita, sur la côte ouest de l’île de Java. Les villages de pêcheurs y côtoient hôtels et pensions, surtout à l’usage des habitants de Jakarta, avides de calme après une semaine dans l’enfer de la capitale. Quelques «bule» (êtres humains à la peau blanche) itinérants fréquentent aussi parfois ces lieux lorsqu’ils sortent de la jungle…
Episode 23
L’équipage a quitté Sumatra et traverse le bras de mer qui la sépare de Java ; en chemin, ils survolent un archipel où fument des volcans actifs, notamment le célèbre Krakatau. A la nuit tombante, ils rejoignent la côte javanaise près de Carita. Ivan, qui a avalé un peu trop de poussières volcaniques, éternue. Le pauvre Bruno se trouve projeté dans les airs. Il tombe dans la piscine d’un hôtel. Tandis que son ami désolé se lance à sa recherche, Bruno doit se tirer seul de ce mauvais pas et se dépêche de quitter la piscine qui lui pique les yeux. Il se cache, craignant pour sa vie, car la nuit arrivant, de grandes chauves-souris tournoient déjà dans le ciel. Il erre de buisson en arbuste, prenant bien garde de ne pas être repéré par les diverses bestioles – varans, rats – qui hantent inévitablement les moindres ilots de verdure. Il trouve finalement refuge dans une sorte de réceptacle douillet mais malodorant laissé aérer sur la terrasse de la chambre 103.
Au petit matin, il est réveillé par un coup de gros orteil dans le popotin et la voix surexcitée d’un petit garçon : « Maman, y a un crapaud dans ma godasse ! ». S’ensuit un drôle de mic-mac : la chaussure passe de mains en mains, les flashs crépitent et Bruno croit sa dernière heure arrivée. Etourdi, il se retrouve finalement au bord d’un petit étang. Les routes se séparent ici : les fous repartent sur leurs vélos et Bruno grimpe dans le minaret de la mosquée voisine, d’où il arrivera à attirer l’attention d’Aude et Ivan, lancés toute la nuit à sa recherche et soulagés de retrouver leur comparse.
Ouf, le voyage peut continuer ! Remonté à bord, il rejoint sa douce Aude et les trois amis mettent le cap sur Bogor, Yogyakarta, Bali, d’où ils traverseront la mer pour rejoindre l’Australie (…).
Fiction que tout ça ? Pas du tout ! Et nous en avons la preuve !
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Côte ouest
Écrit par Famille Carrard | 25/04/2013 07:11Jimi le muezzin
Avant de prendre congé du pays Minangkabau, mentionnons une spécificité locale – comment ne pas la remarquer ? – nous avons nommé le muezzin et l’imam zélés et insupportables. Le phénomène a pu être observé systématiquement de Bukittinggi à Pariaman, très peu ailleurs à Sumatra et assurément pas dans les autres régions musulmanes traversées au cours de ce voyage ou d’autres…
Ça a commencé à Bukittinggi : au petit matin, les muezzins des deux principales mosquées du centre-ville redoublaient de volume sonore et d’amplis saturés, au détriment de la qualité du chant, habituellement harmonieux et très beau à écouter. Ensuite, l’imam jouait des mêmes hauts parleurs pour faire profiter toute la ville de ses prières, mais surtout de ses « sermons » peu rassurants, sur un ton particulièrement criard et agressif. Entre 5h00 et 6h30 du matin, tous les jours ; souvent également plusieurs fois au cours de la journée (sauf que là on s’en fiche). Pauvres fidèles… Nous sommes en pays musulman et devons accepter les coutumes locales, soit, mais là c’était le pompon !
La variante campagnarde maintenant. Dans des bleds en plein Sumatra, on trouve des muezzins surdoués qui, rien qu’à la voix (mais à grand renfort d’ampli pourri et de larsen), réussissent à reproduire le son de Jimi Hendrix massacrant – sur sa Fender Stratocaster à Woodstock – l’hymne américain « The Star Spangled Banner » en imitant les B-52 sur le Vietnam : un vrai coup de maître !
Depuis Padang, retour à la normale, l’appel à la prière du matin, tout comme les quatre autres qui rythment la journée sont harmonieux, bien chantés et durent quelques minutes. Un petit côté exotique sympa et un appel au réveil plus en douceur pour démarrer tôt la journée.
Moussons-nous jusqu’à Bengkulu !
Les 44 épingles à cheveux
Comme déjà dit, chassés par l’imam, départ de Bukittinggi le 5 avril. Selon nos plans légèrement idéalisés, 36 km, comprenant la montée jusqu’au bord du cratère, puis la redescente sur le lac de Maninjau. Le beau temps menace ce matin, ça s’annonce donc plutôt comme une petite journée tranquille… Plans un peu trop optimistes, puisque les 250 m de dénivelé à la montée (BKT 950 m, sommet du cratère env. 1200 m) devront être faits plusieurs fois, la faute à quelques vallées prises en enfilade. Ne nous plaignons pas, maintenant que c’est derrière, nous en garderons un bon souvenir : rizières, buffles, jolies vallées et villages accrochés à leurs flancs.
Enfin les fameuses 44 courbes, pour 800 mètres de descente sur une dizaine de kilomètres, aussi régulières que dangereuses. La vue plongeante sur le lac Maninjau est splendide. La noirceur du ciel d’orage fait ressortir le vert éclatant des rizières.
Un dernier contrôle des freins et nous nous lançons. A chaque virage à gauche, l’équipe tandem au braquage limité a un coup de stress. Impossible de tenir sa gauche dans ces courbes si serrées et si raides. Il faut donc prendre au large en espérant ne pas avoir de mauvaise surprise en plein tournant. Pendant ce temps, Frédo vit un drôle de face à face avec un macaque fâché (contre qui ?) lorsqu’il bâche la remorque aux premières gouttes…
Car l’averse tropicale nous a forcément cueillis avant la fin de la descente. Laure, alors en croûte de sel, rencontre une nouvelle difficulté : la pluie en pleine figure va provoquer une irritation subite de ses yeux. Impossible de les garder ouverts. La caravane est forcée de s’arrêter, le téléguidage par Frédo n’étant pas au programme. Pourtant à l’avant, Léon ne bronche pas de se faire pareillement rincer. Quant à Eugénie à l’abri dans la remorque, elle en profite pour piquer un petit roupillon !
Contents d’arriver en bas, nous nous abritons dans un café et reprenons nos esprits à grand renfort de pancakes au chocolat. Au bout du 20ème « Is this love » en boucle sur l’iphone du fiston, nous demandons à la patronne si elle possède de la musique minangkabau. Toute heureuse de l’aubaine et pour notre plus grand bonheur, elle saisit sa guitare et nous gratifie d’un admirable concert privé. Génial !
Le cœur réchauffé, mais la culotte toujours autant mouillée, nous quittons le café à la recherche d’un toit à dodo, à nouveau sous la pluie. Deux cents mètres plus loin, le Beach Guesthouse, les pieds dans l’eau tiède, fera l’affaire.
Leçon de pédalo
Si l’environnement du lac Maninjau est magnifique, en revanche, après une nuit de sommeil profond – il y a paraît-il eu un tremblement de terre de 5.2 sur l’échelle de Richter vers minuit, mais rien remarqué – nous nous rendons compte au matin qu’il est illusoire d’attendre l’arrivée du soleil. Départ donc sous des trombes d’eau en direction de la mer et de Padang. Qui sait, le littoral sur l’Océan Indien sera peut-être plus épargné par le mauvais temps que les régions montagneuses à l’intérieur des terres ? Dans nos rêves ! Les deux grosses étapes menant à Padang se feront sous la flotte, entre accalmies, petites bruines et grosses tempêtes tropicales. Ici la mousson dure jusqu’en avril compris, qu’on se le dise !
Néanmoins, les paysages traversés par la route menant de Maninjau à l’océan valent le coup d’œil. Le long de la mer, la petite route tranquille est en partie inondée et on ne sait jamais ce que cache la grande mare à franchir. Humainement, les conducteurs sont toujours aussi mauvais et les gens aussi gentils et souriants que lassants : on doit être à 4500 « Hello Misterrrr, what you nèm’ » par jour (c’est sympa, mais ça fatigue un peu les oreilles et les nerfs).
La végétation et la vie ont repris leurs droits depuis le cataclysme qui a ravagé la région le 26 décembre 2004, mais on voit fleurir le long de la route des panneaux indiquant les voies d’évacuation en cas de tsunami. Une nouvelle étape de vélo, cette fois-ci dans un trafic « à l’indonésienne », nous mène à Padang, la plus grande ville de la côte occidentale de Sumatra.
Padang
Pas grand chose de passionnant à faire dans cette ville qui porte encore les séquelles d’un important séisme en 2009. Beaucoup de constructions nouvelles côtoient de vieilles bâtisses ruinées et nous-mêmes logeons dans la partie encore debout d’une maison ancienne qui a été un peu « raccourcie » lors du séisme précité. A la première adresse visitée – « our pick » du Lonely Planet, version 2009 – nous n’avons d’ailleurs trouvé qu’un terrain vague dont le bâtiment ruiné a été arasé au niveau des fondations et les déblais évacués ; cas école pour l’interprétation archéologique…
Le rivage est occupé par une plage-décharge interminable. Là par contre, le tsunami pourrait être passé la semaine dernière. Près du centre-ville, ce sont des alignées d’échoppes à poisson grillé assez cradingues et vides qui à la nuit tombante, mal éclairées et avec la sortie des mendiants et zoneurs en tous genres, ont tout du coupe-gorge. A mesure que l’on remonte la plage vers le nord, terrains de sport, place de jeu sans ombre et quelques barques de pêcheurs tentent de faire illusion au milieu des immondices. De l’autre côté de la route côtière, des grands hôtels tout neufs tournent le dos à la mer et aux bidonvilles qui leur font du pied.
Pour contrebalancer cette image assez peu reluisante, de la plage, on admire les magnifiques couchers de soleil sur l’Océan Indien, en particulier en cette période de fin de mousson lorsque les gros cumulonimbus guignant à l’horizon semblent littéralement s’embraser. Mais en définitive, Padang n’est pas le lieu où nous viendrons passer nos prochaines vacances balnéaires.
Bengkulu
Nous effectuerons en bus de nuit la route pour Bengkulu, théoriquement 570 km de route côtière. En fait, nous allons prendre l’itinéraire montagneux pour 840 km et 16 heures de trajet ; option pittoresque slalomant entre hauts plateaux et vallées. En fin d’après-midi, la première partie du trajet dans la vallée de Solok offre des coups d’œil grandioses sur les rizières et les volcans éteints environnants, recouverts par la forêt tropicale. Dans les villages, une part importante des maisons est en bois sculpté et peint dans la tradition minangkabau. Nous quittons ensuite les volcans pour les pics karstiques. Le reste se fera de nuit, entassés, avec Léon et Eugénie qui commencent à se faire à l’inconfort des trajets en bus.
Arrivés à Bengkulu aux aurores le 9 avril, deux journées seront nécessaires à reprendre nos esprits, nous remettre des courbatures, constater que le centre-ville est beaucoup moins joli que les kampungs-bidonvilles périphériques et surtout poster un paquet de souvenirs transbahutés depuis Toba.
Encore un effort !
Nous tentons ensuite la route côtière en direction de Bandar Lampung. Une bonne dizaine de jours de vélo à faire, alors que déjà la moitié de notre temps de visa indonésien est écoulée ; et l’extrémité sud-est de Sumatra semble être le bout du monde. Tant pis, on y va !
Chauffe Marcel
Près de la mer, les régions les plus plates entre Tais et Kota Manna sont envahies par les palmeraies, mais après Bintuhan, les reliefs sont particulièrement escarpés : la jungle y est encore quasi inviolée et a encore de beaux jours devant elle.
Autant les villes-étapes sont bétonnées et moches, autant les villages de paysans de l’intérieur des terres et de pêcheurs sur la côte sont typiques et souvent pittoresques, avec leurs maisons aux parois de bambou ou de torchis peint de couleurs pastel. Dans les rizières, les petites dames pataugent dans la boue à repiquer du riz ; c’est un festival de chapeaux pointus colorés, vissés des bouilles au sourire inamovible.
Nous tiendrons trois jours à vélo sur la partie du trajet théoriquement la plus plate des 600 km qui nous séparent de notre objectif, avant que la chaleur et les montagnes russes qui rythment ces paysages ne nous ramènent à la raison.
Cette très belle région côtière, où les rizières et la jungle proche se font de l’œil, vaut vraiment le détour… mais pas à vélo avec des enfants.
La goutte qui fait déborder le vase : des ados prêts à l’attaque en hurlant et visant le tandem au ballon de foot ! Pour une fois, le pétage de plomb de Laure gentiment épuisée sera salutaire. De Bintuhan, après une petite parenthèse plage, nous décidons donc de reprendre le bus.
Crouille bahut
Nous croyions avoir tout vu en matière de transports pourris, c’était avant de connaître la compagnie Krui Putra. Notre bus est arrivé avec 1h20 de retard pour cause de pneu crevé.
A ce stade, en voyant l’état des pneus en question, on se demande vraiment si ça vaut encore la peine d’en mettre sur les roues. 1h30 de plus seront consacrées à la réparation de la roue de secours : en fait, comme la chambre à air était complètement déchirée, il a fallu attendre qu’un bus de la même compagnie fournisse une autre chambre à air percée de secours, elle réparable… Mais ce n’était que le début ! Au cours du trajet, le moteur a serré au moins cinq fois, avec calages en pleine montée dans des pentes démentes à 20%, bloquant toute la circulation. Nous avons également dû changer de batterie, faute de pouvoir allumer le moteur après un des nombreux calages… Lorsqu’il fallait embarquer des passagers en route, Frédo a dû se muer en aide-chauffeur et s’occuper du bloquage/débloquage de la porte arrière par un loquet improvisé, puisque les deux préposés à cette tâche se roupillaient parmi sur la banquette…
Finalement, nous arriverons à Bandar Lampung, avec seulement trois heures de retard, grâce aux talents de notre chauffeur : il faut savoir qu’en Indonésie, chaque conducteur de bus est un Ayrton Senna en puissance (vie et mort ?). Le sommet, c’est la gare de la compagnie Krui Putra : un bourbier indescriptible, d’où émergent les immondices les plus diverses et dans le désordre le plus total les carcasses de toute une série de véhicules semblables au nôtre, accidentés ou en phase de démontage-récupération. Nous déchargeons notre attirail avec la désagréable surprise de récupérer une sacoche à habits imbibée de mazout et attendons que notre carrosse poursuive sa route jusqu’à Jakarta (inch’Allah !) pour sortir nos kits petit déj’ de céréales au chocolat et commander thés et cafés, avant de remonter sur nos vélos, eux aussi encore entiers…
Kalianda
Comme tout ce qui ne nous tue pas nous rend plus forts (déjà dit précédemment, mais ça se confirme), nous ne nous arrêtons pas à Bandar Lampung. Au taquet après notre nuit de bus, nous reprenons des forces à coups de cafés et de donuts dans la succursale locale d’une grande chaîne capitaliste de cochonneries occidentales. Puis nous embrayons pour Kalianda, petite ville autoproclamée station balnéaire imaginaire au bord de la mer. Rien à y faire, pas de village pittoresque, la plage, c’est pas ça non plus.
Nous goûtons peu le fait d’être dévisagés à chaque coin de rue et pris pour des bêtes de foire. Pour clore en beauté, pour la première fois depuis Jishou, en Chine, nous avons le sentiment de ne pas être à notre place ici ; outre les éternels « bule » (= blanc) appuyés et sur un ton peu amène, nous reconnaissons pour la première fois un témoignage haineux de la part d’enfants : un gosse qui complètement gratuitement vous fixe du haut de sa moto et de ses 7-8 ans dans le blanc des yeux vous gratifie d’un doigt d’honneur et d’un « f*** you ! », forcément, ça fait mal. Le fait reste isolé et nous avons en règle générale un contact très sympa avec les locaux, même si nous les trouvons souvent trop insistants et intrusifs…
Par contre, chouette et sympathique hôtel dans une maison « bourgeoise musulmane post-coloniale » tenu par une famille accueillante. Allez, on fait une petite pause avant de franchir le détroit à 30 km. Cure de martabak-kacang-susu (sortes de crêpes épaisses avec une sauce sucre-lait condensé-cacahuètes concassées, excellent mais pas léger-léger…), burgers-frites et rattrapage vitamines après l’achat de kilos de fruits au marché. A part les sorties pour les repas, la moiteur nous dissuade de quitter notre pied-à-terre. Léon et Eugénie, qui ont trouvé leurs marques plus rapidement que les parents, jouent avec les enfants de la maison, s’installent à peu près partout (surtout au chemin !) pour créer de nouvelles oeuvres sur papier ou en lego et visitent la crèche attenante. Eugénie participera même à un cours de dessins au milieu de petits écoliers en uniforme bleu.
Profitant de la fraîcheur du soir, nous nous offrons une petite excursion pour voir la mer et le port. Au retour, nous nous arrêtons dans l’entrepôt où le cacao de la région est amené et reconditionné. Petits et très petits producteurs se côtoient et nous croisons un monsieur qui apporte sa récolte sur sa moto : l’équivalent d’un demi cornet migros de fèves séchées, prêtes à être envoyées à la chocolaterie de Jakarta pour être torréfiées et moulues.
Sumatra saturam(us)
Mais nous voulons quitter Sumatra et changer d’atmosphère. Derniers épisodes désagréables : le type qui tente de nous racketter pour récupérer notre compteur tombé par terre à une pause et, 3 km plus loin, le camion qui fait un dépassement insensé et nous oblige à sortir de la route pour éviter l’accident. Nous avalons rapidement les 30 derniers km qui nous mènent au bout de l’île avec Java en ligne de mire.
C’est à la fois avec une foule de belles images en tête et un certain ras-le-bol que nous embarquons sur le ferry pour Merak le 18 avril, en chantant « La Javanaise ».
A bientôt dans « La traversée express de Java » par Bruno le crapaud !
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