Au milieu coule une rivière
Écrit par Famille Carrard | 22/09/2012 – 18:57Vacances à Guilin
Suite aux détours montagneux consentis dans le Hunan, qui ne nous ont pas empêché de profiter des paysages et de dûment documenter quelques curiosités cocasses sur la route, cinq jours de vélo d’affilée ont fini de nous achever ; il fallait pourtant passer par là pour atteindre notre assugrine : quelques jours de « vacances » à Guilin.
Nous avions eu tout le loisir de dresser un portrait très vert de Guilin en lisant et relisant les informations données par le Lonely Planet. Au premier abord, nous avons donc ressenti une certaine déception les vingt derniers kilomètres à rouler comme d’habitude dans le bruit, la pollution et la catelle… Heureusement, la zone de banlieue traversée, la récompense était au rendez-vous lorsque nous avons découvert une ville aux rues propres et aux terrasses (sans riz) avenantes, entre de multiples bras de la rivière Li, au milieu de pics et de parcs verdoyants, abritant lacs et pagodes.
Même l’auberge de jeunesse avait un goût de reviens-y, à tel point que nous avons prolongé le séjour d’une nuit. Afin de profiter au maximum, nous avons joué la carte du presque vrai touriste – tout en continuant de louer une seule twin pour les quatre et d’acheter nos petites briques de « pure milk » au supermarché ! Sinon, nous devons avouer que la deuxième pizza du voyage nous a ravis et que la salade de crudités n’a – pour une fois – pas eu le temps de cuire ! Quant au staff de l’auberge, il a été très avenant et n’a pas hésité à passer des chansons pour enfants à la place de musiques destinées à un auditoire de backpackers en manque de « western habits ».
Pendant que Frédo révisait nos montures d’acier devant notre première maison du voyage, nous avons eu l’occasion de rencontrer des enfants dont les mamans ont vite fait de flairer le bon plan : les abandonner sournoisement à Laure pour retourner vaquer à leurs occupations (certes tout à fait valables, la plupart tenant des commerces dans la rue) lorsqu’elles ont vu que la nouvelle nounou du quartier sortait feuilles, stylos, colle et offrait même le goûter… voilà que Laure, qui cherchait justement à caser ses deux casse-cou, se retrouve attablée avec cinq enfants !
Il y eut d’autres rencontres sympas et plus reposantes, comme celle de Brigitte, une Française voyageant un mois en Chine ou encore celle de Jamel, un étudiant belge tout juste arrivé à Guilin pour étudier le chinois. Sans se préoccuper de la différence d’âge, Léon lui a tenu de longs discours, très heureux de pouvoir parler français à d’autres interlocuteurs que ses parents et sa sœur. Il s’est même essayé à des questions intimes telles que : « Tu as pris ton pyjama ? ».
Les enfants piaffaient d’impatience à l’idée de voir des pandas. La visite du grand « Seven Stars Park » à entrée multi-payante (deux passages de caisse pour trouver l’enseigne du zoo…) leur a permis d’admirer ces nounours bicolores au milieu de petits Chinois surexcités à l’idée de rejoindre le parc d’attractions – bien sûr aussi payant – se trouvant dans le zoo. Léon et Eugénie ont été bien braves en se contentant de la place de jeux car il était impossible de leur offrir un ou deux tours de manège. Non, il aurait fallu encore payer le troisième forfait de la matinée incluant 13 tours. Et un ticket par enfant, je vous prie ! Finalement, le château gonflable de nuit sur la place centrale les satisfera et nous aussi. Depuis notre arrivée en Chine, le château gonflable que nos deux terreurs appellent invariablement « trampoline », est un précieux allié lorsqu’il s’agit de dépenser leur trop plein d’énergie…
Et les mollets pendant c’temps-là ? Ils ont mis au moins trois jours à se détendre… outre le trop plein de vélo, il ne faut pas omettre les sprints encore réguliers que nous embrayons dans les rues à la pêche aux enfants fugueurs. Mais les parents ont heureusement les sens en éveil et continuent inlassablement à répéter pourquoi telle bêtise est plus dangereuse que telle autre, que nous ne devons pas les perdre de vue etc… en espérant qu’ils seront aussi réceptifs à leurs rengaines qu’à celles d’un camion gicleur d’eau beuglant « Vive le vent, vive le vent (… )» (Si, si, ça existe partout en Chine !). A leur décharge, nous devenons tous un peu sourdingues à cause du vacarme ambiant, la palme d’or revenant aux klaxons brise tympans des bus.
De Guilin à Yangshuo
Ayant rechargé les batteries pendant quatre jours à Guilin, nous étions prêts à en découdre avec l’étape de Yangshuo. Comme les routes évitent la partie la plus pittoresque du cours de la rivière Li, le scout de la bande avait échafaudé – sur la base de sources diverses et plus ou moins assurées (mélange d’infos des pages 592 et 597 du Lonely Planet, ainsi que d’autres, picorées sur diverses cartes touristiques – parfois contradictoires – en bitmap sur d’obscurs sites internet…) – tout un plan qui devait nous permettre de longer à vélo la rivière entre Yangdi et Xingping, son tronçon réputé le plus pittoresque ; en prenant des ferries pour traverser la rivière, nous étions supposés pouvoir suivre la piste sur la rive opposée, le tout pour une vingtaine de Yuans par personne. On l’a bien fait sur le Danube, pourquoi pas sur la Li, après tout ! Passons les détails : les ferries existaient, mais toujours à quai, avec éventuellement un vagabond qui dormait dessus. Pas l’ombre d’un moyen de traverser la rivière dès Yangdi : nous aurions pu faire au mieux 500 m de tout-terrain avant d’être bloqués par une falaise à pic. Nous nous sommes donc offert pour nos 7 ans de mariage (ben ouais, c’était le 10 septembre) la vraie croisière touristique en radeau-bambou pour dix fois le prix théorique des ferries, mais en économisant 16 km de pédalage, ce qui a réduit la longueur de l’étape vélo proprement dite à sa portion congrue : 87 km (dont 15 de nuit et 2 sous une pluie diluvienne…).
Ne faisons pas la fine bouche : cette excursion en radeau nous a permis d’apprécier à sa juste valeur le spectacle ahurissant de ces pics calcaire plongeant dans la rivière. En fin de journée, la lumière rasante prodiguait aux parois rocheuses des teintes magnifiques et nous nous sommes essayés à l’art de la prise de vue en contre-jour avec quelques modestes succès pour les photographes-amateurs très peu éclairés que nous sommes.
De Yangshuo même, nous gardons le souvenir d’une petite ville perdue dans le grand cirque de ses pics, où le local se consacre corps et âme à convaincre le touriste que la babiole qu’il a à lui vendre est moins chère et de meilleure qualité que dans les 48 échoppes environnantes présentant le même produit. Néanmoins, nous y avons vu quelques très belles productions artisanales : chapeaux, tissage, maroquinerie ou divers bibelots. C’est surtout l’ambiance bariolée et animée des marchés cachant les vieux bâtiments décrépis qui fait le charme de l’endroit.
Nous avons ensuite déplacé notre camp de quelques kilomètres dans la vallée de la rivière Yulong (Dragon) pour tester l’Outside Inn, un village-hôtel, conceptualisé par une famille Suisse (et récemment reprise par un Hollandais) dans un village à l’abandon dont les maisons ont été retapées une à une. Expérience fantastique, pour le cadre pittoresque et, plus prosaïquement, grâce à une grande caisse de légos, qui nous a permis de souffler un peu… (vous suivez ?).
Bircher, lasagne et salade sont venus nous rappeler que nous autres Helvètes ne sommes pas configurés pour nous nourrir de chats et de pieds de poulets bouillis
Cette mini-étape a été complétée par une excursion à vélo sur les deux rives de la rivière Yulong et par le Pont du Dragon. Bien que sans bagages, la balade s’est avérée épique… devinette : est-il plus facile de faire passer une remorque avec un écartement de roues de 86 cm sur une berme de 70 cm entre deux rizières ou dans un chemin creux de 60 cm de large… ?
A force de fantasmer sur les trempettes régulières des buffles, nous avons improvisé une petite baignade à la nuit tombante juste pour nous rendre plus appétissants auprès des féroces moustiques… l’occasion également de vous faire apprécier l’esthétique très réussie de nos bronzages de cyclistes.
Go west…
En une semaine, nous avons réalisé un véritable contre-la-montre jusqu’à Nanning, poussés par l’envie (et la nécessité) de régler au plus vite les demandes de visas vietnamiens : le 29 septembre, nous devons impérativement avoir quitté la Chine ! Les lasagnes hollandaises n’ayant apparemment pas convenu à Laure, les premières étapes ont été laborieuses jusqu’à ce que bananes, riz et bioflorin veuillent bien réunir leurs forces pour qu’elle puisse consacrer toute son énergie à appuyer sur les pédales. Après un jour de pause réparateur à Liuzhou, nous avons mis le turbo pour arriver un jour plus tôt que prévu à Nanning : nous avons bouclé les 200 derniers km en deux étapes (108 et 95 km) au lieu des trois prévues ! Eugénie et Léon ont merveilleusement bien joué le jeu et se sont relayés sur le tandem pour participer – à leur manière (3 coups de pédales, un tas de questions, puis grande sieste dans la remorque…) – à l’effort collectif! Le ciel couvert, les températures plus fraiches et les routes presque plates ont fortement contribué à booster toute la famille.
Aujourd’hui deuxième jour d’automne, nos passeports sont au consulat vietnamien. Et nous, nous patientons jusqu’à lundi, passant en revue notre folle traversée chinoise pour dresser prochainement un bilan de nos trois premiers mois de voyage !
5 commentaires »
De Marraine Céline le 23 Sep 2012 | Répondre
Woaw, génial!
Mais vous êtes fous ces longueurs d’étapes que vous faites, c’est carrément digne du Tour de Chine professionnel! Et encore, ils ont pas de bagages, eux!
J’adore le bronzage cycliste, vous êtes chous tous les quatre!
Sur la photo des crêpes, Eugénie a même un petit air tout asiatique, extra!
J’vous fait des becs et vivement le Vietnam! 😉
De MaryCl le 24 Sep 2012 | Répondre
Hi la famille Carrard,
Vos photos sont magnifiques. Bonne suite d’aventures pour le Vietnam, j’espere que le bronzage va pouvoir etre fignole! Bises from Leeds,
De Micheline et Albert le 25 Sep 2012 | Répondre
OUF !
Sans nouvelles de votre part, je flippe, comme l’accro au feuilleton devant sa télévision en panne…. Ravie de lire la suite de vos aventures et surtout ravie de vous savoir tous en bonne forme et bon esprit. Que le Vietnam vous soit tout aussi favorable.
Amicalement
Micheline
De La cuisine de Tom Pouce le 28 Sep 2012 | Répondre
Salut les Sportifs !!
C’est un plaisir de vous lire, et de voir que tout se passe plutôt bien…
Bonne route à vous quatre…..et merci pour la carte Postale !!
A plus !
R+N+A !!!
De Maman le 30 Sep 2012 | Répondre
Salut les Quatre !
Jacques m’ayant enfin expliqué où je dois écrire mes messages, je m’y mets !
Je ne sais pourquoi, mais il me semble que votre dernier récit a qqc de plus rassurant que les précédents. Peut-être aussi le fait que nous vous ayons entendus et vus sur skype.
La photo en contre-jour avec l’eau et les pics est fabuleuse (celle-là me donnerait presque envie de voyager). Et deux photos d’Eugénie ne font furieusement penser à ma petite Laure du même âge – petit coup de blues sur le temps qui passe… No further comment sur le bronzage, vous n’êtes pas au Club Med!
Gros becs et bonne continuation.