Aventures en famille

Plein sud… et des détours !

Écrit par Famille Carrard | 22/06/2013 – 16:08

On the road…

Rouler à vélo en Australie, c’est un peu comme faire du surf au Cap Nord ou du hockey sur glace en Libye : on a légèrement l’impression d’être des originaux. Ici, la maison roulante est grande reine ! Et quand ce n’est pas le 4×4 qui tire la caravane, c’est le camping-car qui balade une jeep (pour les petites escapades). Voyager léger n’est pas dans les habitudes des gens ici… Donc sur les routes, quand on est cycliste, on met son gilet fluo, on tient sa gauche, on espère que les autres usagers regardent la route et on croit en sa bonne étoile.

Pour ce qui est des routes, nous aurons à peu près tout fait : aux abords de certaines agglomérations, il y a de vrais itinéraires cyclables bien balisés et la plupart des chemins pédestres en bord de mer, sur les quais et dans les espaces verts sont ouverts aux vélos: « share the path ».

Par contre, les entrées et sorties de villes réservent parfois des surprises, avec des pistes cyclables balisées qui mènent aux fraises, dans des culs-de sac ou un talus. Idem lorsqu’on arrive dans les lieux habités : on se fait klaxonner parce que nous ne sommes pas à notre place, alors qu’il y a une piste cyclable de l’autre côté de la glissière ; la question est de savoir comment y accéder lorsqu’on arrive par la route…

Nous avons fait passablement de kilomètres sur la Pacific Highway. C’est très variable: elle peut être sous sa forme non rénovée, comme une petite route cantonale chez nous ou être une autoroute super moderne où les cycles sont autorisés à rouler sur ce qui est assimilable à la bande d’arrêt d’urgence. Lorsque celle-ci est large et séparée par des bandes rugueuses, ça va ! Lorsque c’est en travaux ou que l’on se trouve sur la vieille autoroute aux accotements pourris, c’est un peu plus stressant. Nous avons au maximum pris les petites routes, mais finalement, comme elles sont étroites, ce n’est pas forcément plus rassurant lorsqu’un gros bahut déboule.

Nous avons tenté l’expérience rurale, avec les petits chemins de campagne, goudronnés ou pas. Nous avons quelquefois fait de belles tirées de 30 km sur des « dirt roads », de terre et gravier damé au cœur de paysages et couleurs magnifiques dans des parcs nationaux. C’est plus fatiguant, mais là on est en immersion totale dans l’Australie campagnarde et on se sent seuls au monde. Sentiment assez fou, après des mois d’Asie où nous avions toujours l’impression d’avoir du monde autour de nous même dans les coins les plus perdus. Allez faire pipi derrière un arbre en Chine, la place est déjà prise !

One, two, three… soleil !

Le climat se déglingue et il n’y aura vraisemblablement aucun Européen pour le nier en 2013. Les prévisions météorologiques des dernières semaines n’étaient pas du tout fiables. Nous avons eu bien souvent des journées de vent du sud-soleil alors qu’on nous promettait des trombes d’eau. Heureusement, en règle générale, l’erreur se produisait plutôt dans ce sens-là. Bonne surprise, mais ça rend tout de même l’organisation de nos étapes assez aléatoire.

Les nuits étant fraîches, nous avons tenté quelquefois le camping et nous sommes finalement rabattus sur les cabines avec cuisine agencée dans les campings ou encore les motels.

Pas toujours donné, mais ça permet de se faire à manger et donc de limiter les repas au restaurant. Nous avons aussi tenté les pubs qui ont des chambres toutes simples à l’étage, souvent la solution la meilleure marché dans les petites localités sans camping (et la plus proche d’une bonne petite mousse !).

Round, round, get around – I get around !

S’il y a une espèce qui n’est pas en voie de disparition sur la côte pacifique, c’est bien les surfeurs. Il y en a partout, et ils sont le public cible pour la plupart des commerces ainsi que des infrastructures touristiques et ne se séparent jamais de leur planche. C’est d’ailleurs l’objet multi-usages en particulier sur la Gold Coast : panneau de signalisation, enseigne d’hôtel, elle peut aussi servir à l’ornementation des places de jeux, comme mur de grimpe ou comme banc public.

Autre caractéristique : le véhicule – du Hummer au bus VW, ça dépend du statut social du surfeur – semble être tout entier dévolu au transport de la sacro-sainte planche et donne parfois l’impression qu’on a d’abord fixé celle-ci à une hauteur donnée sur un support imaginaire et ensuite construit la voiture dessous. A Byron Bay on croise régulièrement la version hippie : le chevelu chevauchant un vieux biclou où a été soudée une sorte de structure en fer à béton de récup’ dont l’unique usage est le transport de… allez quoi ? Vous l’avez deviné !

Le surfeur lui-même se reconnaît à des kilomètres : on ne saurait pas dire pourquoi, mais il a une dégaine qui ne trompe pas… tout est dans la gestuelle et la « cool attitude». Nous avons même voulu parier que si on mesurait les bras d’un surfeur, il y en a forcément un (en principe le droit) plus long que l’autre…

Dans tous les cas, le vent tourne et c’est l’excitation, on voit courir les vrais sportifs vers la plage, sur la route, pour ne pas louper LA vague (mais oui, celle de Point Break!).

Mais quelle n’a pas été notre surprise en voyant à proximité d’une plage un panneau « Surfers Reserve » (entre la « State Forest » et le « National Park »). Voici encore un vibrant exemple des efforts considérables consentis par les autorités pour préserver les espèces indigènes. Nous ignorions que les surfeurs étaient une espèce menacée ! Gros délire à la pensée que s’il en était des surfeurs comme des koalas, échidnés et autres dindons australiens, nous verrions fleurir les panneaux de mise en garde du style : « Do not feed the surfers » afin d’éviter de créer des déséquilibres dans leur régime alimentaire ou qu’ils perdent l’habitude et la faculté de se nourrir par eux-mêmes…

Alarmes incendies

Frédo s’est découvert une nouvelle spécialité : tester le fonctionnement des alarmes-incendies. Une fois de plus, ceux qui l’ont connu aux scouts ne manqueront pas de relever que ce n’est pas nouveau… Première cabine, premier départ d’alarme ! Au motel de Byron Bay, utilisation du grille-pain le premier matin : pas besoin que les toasts soient complètement carbonisés ; à peine un peu brunis et c’est parti. Bip criard dans les oreilles, le propriétaire débarque manu militari et, le regard sévère, lève un doigt accusateur : « You burnt the toasts ! » … ça rigole pas avec les toasts, en Australie ! Depuis, on ne les compte plus. La dernière en date, en faisant rôtir des croûtons pour la soupe à la courge à Port Macquarie. Léon a pris le pli : il court ouvrir les fenêtres dès que ça commence à bipper.

On prend le café à l’église

Fin d’étape un peu difficile le 7 juin : nous arrivons à Broadwater par la Pacific Highway avec deux idées en tête : 1° faire un pause bien méritée pour goûter et boire un jus ; 2° s’arrêter pour la nuit dans un sympathique camping pas cher (il y en a un à la sortie du village, 2 km plus loin).

Nous apercevons une très jolie église en bois à l’ancienne comme on en croise régulièrement. A y regarder de plus près, une grande pancarte plantée à côté indique « Café ». Voilà qui fera l’affaire ! A l’intérieur, nous découvrons un véritable musée : la tenancière est une passionnée de céramiques et de mobilier d’après-guerre et a recréé des pièces « à grand-maman » dans un style très « vintage anglo-saxon ». Vieilles radios, théières en porcelaine, tables en formica, tout y est ! La partie tea-room est à l’avenant. Nous entrons enchantés et tout en zieutant les gigantesques muffins et fudge cakes au chocolat du présentoir, déclarons que ç’eut été pêché de ne pas faire halte en ce saint lieu. La tenancière nous désigne le confessionnal en rigolant, mais nous déclinons l’invitation et nous rabattons sur un excellent café écolo et éthique torréfié maison. Nous bavions tellement d’envie qu’elle nous a chrétiennement offert un énorme et succulent muffin ainsi qu’un pavé de fritata (espèce de tortilla triple épaisseur au four) à l’emporter. Comme on dit par chez nous : « Quelque part, il doit y avoir un bon Dieu… » !

Les kangourous

Nous les avons cherchés dans la forêt, au bord des routes ou dans les hautes herbes, mais finalement, c’est auprès des hommes que ces charmants animaux se plaisent. Pas étonnant donc que nous en ayons la première fois repéré un troupeau d’une bonne vingtaine dans un pré au milieu des vaches. La seconde fois – la plus drôle – ce fut un face-à-face assez surréaliste : nous nous trouvions sur la Pacific Highway, le couple de kangourous sur un green de golf voisin. Ils sont restés plantés bien cinq minutes à côté du petit drapeau, les yeux rivés sur nous à se demander ce que nous fichions là. Sans accorder la moindre attention aux gentils papys qui attendaient goguenards cinq mètres derrière eux avec le club posé sur l’épaule, de pouvoir pousser la petite balle dans le trou. Ce n’est que lorsque nous avons dégainé l’appareil photo pour immortaliser le joli tableau qu’ils ont déguerpi devant ce qu’ils devaient considérer comme une arme de destruction massive…

Depuis, nous en voyons souvent, dans des jardins de particuliers, devant des supermarchés ou malheureusement, parfois en pièces détachées sur la route.

Au pays des éclopés, les koalas sont rois

Le nez en l’air, nous avons mis plus de temps à trouver les koalas… Enfin, après plus d’un mois d’Australie, à Port Macquarie, nous avons pu admirer ces charmantes petites boules de poils. Et pas n’importe où : comme nous ne faisons jamais rien comme les autres, nous ne nous sommes pas rendus au zoo, mais à l’hôpital qui leur est entièrement consacré ! Il y a de quoi faire, entre ceux blessés dans des feux de forêt, les traversées de route et les attaques de chiens. Une carte de la ville répertorie d’ailleurs au moyen de pastilles de couleurs  les agressions des rex & cie sur ces inoffensives peluches grises au cours des cinq dernières années : une vraie bataille de confettis ! Pour les grands brûlés, aveugles  et autres miraculés qui ont parfois survécu à plusieurs accidents de camions, des plaquettes individuelles racontent leur combat contre la mort et leur quotidien sur place. Chaque enclos – chambre d’hôpital – a un eucalyptus en son centre et lorsque les koalas recommencent à grimper au sommet pour se nourrir par eux-mêmes, cela montre que la guérison est en bonne voie. Nous avons ainsi vu deux jeunes koalas délaisser le tas de feuilles mis à leur disposition pour aller grignoter du frais au sommet de leur eucalyptus privé.

Endroit très touchant et très intéressant, tant pour les enfants que les parents. Les dons des particuliers ou les bénéfices de la boutique de souvenirs à l’entrée contribuent à financer l’hôpital.

Un peu de pédagogie (et de wifi) en bibliothèque

Depuis notre arrivée en Australie, nous profitons des jours de pluie et de pause, en particulier les fins de journées lorsqu’il commence à fraichir, pour passer un peu de temps dans les bibliothèques municipales. Nous nous y sommes également essayés occasionnellement en milieu d’étape, le temps d’une averse. Il y a systématiquement un coin enfants bien achalandé, parfois avec des jeux. L’occasion d’un petit moment lecture et pour Frédo de s’exercer pour le championnat de traduction simultanée libre de livre d’enfants. Nous en profitons aussi pour utiliser les accès internet gratuits, car il faut bien avouer que depuis notre arrivée dans le pays, les connexions sans fil en motel ou camping, c’est pas vraiment ça ! Cher et lent, ça ne fonctionne souvent pas du tout. On en vient à regretter la qualité du wifi entre deux coupures de courant à Sumatra, c’est dire !

God Save The Queen

L’Australie, ancienne colonie britannique a une population très cosmopolite aux origines les plus diverses : Brisbane a son quartier grec, Woolgoolga sa communauté sikhe… pourtant, malgré une indépendance plus que centenaire, l’Australie reste rattachée – en tout cas symboliquement – à la couronne.

The Queen’s Birthday est par exemple férié et c’est l’occasion d’un long week-end dont les dates varient d’une année à l’autre : en 2013, c’était du 7 au 10 juin. Au fait, c’est quoi la date exacte ? Qui a égaré le carnet de naissance de la petite Elisabeth ? – Le 21 avril (et cela, chaque année depuis 1926 !), comprenne qui pourra…

La plupart des toponymes donnés anciennement par les premiers colonisateurs se réfèrent à des noms de personnes ou de lieux de la métropole. Cela donne parfois lieu à de doux mélanges entre les diverses composantes Britanniques ; ainsi, nous avons séjourné à Maclean, ville qui revendique haut et fort ses origines écossaises – 4000 migrants des Highlands se sont installés dans la région après la famine de 1860. La ville écossaise se situe au coeur de la Nouvelle Angleterre (New England), dans la province des Nouvelles Galles du Sud (New South Wales)… nom d’une Picte, c’est à y perdre son Cornique !

A la rencontre des enfants… australiens

Quelques jours après notre départ de Brisbane, Lisa nous a abordés lors de notre pause pique-nique. Une habituée des voyages à vélo avec son mari, elle était très heureuse de voir qu’on pouvait voyager avec des enfants, les siens ayant respectivement 5 et 7 ans. Le courant a passé instantanément, échange d’adresses et invitation à nous rejoindre plus au sud grâce au long weekend de Queen’s Birthday. Nous lui avons donné nos prochains points de chute et toute la famille a réussi à nous faire une visite d’une journée à Maclean.

C’était trop beau pour être vrai, surtout avec un temps incertain et sachant qu’ils avaient 2 heures de route pour venir. Pourtant, Lisa, son mari Craig et ses enfants Jacob et Abi ont débarqué devant notre mini cabine pendant que nous étions affairés à la laundrette. Dans la voiture, il y avait deux caisses de jeux préparées par les nouveaux amis (qui s’imaginaient rencontrer des enfants pauvres puisque sans jeux) et de savoureux gâteaux maison. Nous étions très contents de pouvoir les inviter « chez nous » pour le tea time. Enfin… seuls les enfants ont pu s’installer à l’intérieur, faute de place ! Une journée géniale pleine de partage et de rires qui nous a bien changé notre quotidien à 4 sur le mode « vélo-dodo-vélo-dodo-repos ». Un immense merci à la famille Olsen !

Gold Coast, Nouvelle Angleterre, et maintenant ?

Mais venons-en à l’essentiel : d’aucuns se posent peut-être la question : mais où sont-ils ?


Nous avons fait notre petit bonhomme de chemin et au moment de poster cet article, nous nous offrons une petite pause à Raymond Terrace, près de Newcastle, à environ 160 km au nord de Sydney. Nous touchons donc au but. Pour en arriver là, il a fallu pas mal pédaler contre vents et marées, c’est le cas de le dire. Face à nous, le vent du sud (bon frais) ressemble à s’y méprendre à une bonne bise de chez nous: c’est froid et sec, mais en général accompagné de soleil.


Nous avons suivi les aléas de la Pacific Highway et, chaque fois que c’était possible, pris les itinéraires côtiers. C’est très varié, entre les stations balnéaires ou à surfeurs sur la Gold Coast, les localités plus bohème, comme Byron Bay.


Nambucca Heads et Port Macquarie sont aussi de sympathiques petites villes-étapes où il fait bon aller admirer aigles de mer, cormorans, pélicans et dauphins en attendant le ferry. A la nuit tombante, c’est dans un brouhaha que les cacatoès et les loriquets se réunissent tous dans le même arbre au bord de l’eau.

En règle générale, plus on va vers le sud et plus on trouve des petites villes assez sympas, autour de baies, estuaires et rivières qui découpent la côte nous obligeant à pas mal de détours. Ces derniers jours, malheureusement sous un ciel gris et froid, nous avons traversé le district des lacs au nord de Newcastle.

De Raymond Terrace, il nous reste désormais trois journées de vélo pour rejoindre le centre de Sydney. Nous allons passer quelques jours dans une famille qui nous accueille grâce à Andy, cycliste avec qui nous avons sympathisé au détour d’un méandre de rivière…

Alors forcément, un sentiment étrange nous envahit à l’approche de l’opéra. Sur nos vélos, nous chantons chaque jour nos états d’âme tantôt joyeux, inquiets, heureux, mouillés, gelés, réchauffés, rassurés.

Enfilez vos maillots et partagez en pensées les derniers kilomètres avec nous, nous nous retrouvons tout bientôt à Sydney !


4 commentaires »

  1. De sorribas jean-paul et marie-line le 22 Juin 2013 | Répondre

    Un petit bonjour de Toulon pour Fred Laure et les enfants
    On s’est rencontrés a l’hotel Appa Kaba à Malaca
    Nous suivons vos peripeties depuis notre retour de Malaisie debut Avril et on se regale a la lecture de vos aventures
    Bises a vous quatre.
    Je vais prendre un petit pastis car l’heure de l’apero arrive et dans le midi c’est sacré
    A bientot peut-etre.
    jean-paul , Marie-line

  2. De Micheline Rusterholz le 24 Juin 2013 | Répondre

    Voilà un récit plus « européennisé » que les précédents, peut-être une bonne étape de transition entre l’éxotisme asiatique et la très prochaine réalité helvétique. Nous avions beaucoup aimé la région de Sydney. Nous y avions marché quelques fois dans les parcs nationaux aux alentours de Patonga.
    Et Sydney est réellement une belle ville, par contre pour le vélo !!! c’est peut-être un peu difficile mais vous êtes aptes, maintenant, à affronter toutes variétés de routes.
    En disant : a bientôt, ça devient une très proche réalité.
    Amicalement
    Micheline

  3. De Nicole le 25 Juin 2013 | Répondre

    Salut les Carrard,
    juste pour vous dire qu’on se réjouit de vous voir bientôt – j’espère que ca tient toujours – et pour vous donner mon nouveau courriel.
    Splendides photos de Bali et de l’Australie, je ne regarde pas très régulièrement…
    Nicole

  4. De Marraine Céline le 28 Juin 2013 | Répondre

    Oooh l’Australie j’aime 🙂 Je suis aussi allée à l’hôpital des koalas de Port Macquarie, génial! Vous faites envie en tous cas. Bravo 🙂 Vous allez éditer un bouquin à votre arrivée avec tous ces récits? Y aurait largement de quoi faire! Et merci pour ces photos qui font rêver!

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