Aventures en famille

Bali, on revit !

Écrit par Famille Carrard | 23/05/2013 – 11:58

Bali, rien que le nom fait rêver ! Sans doute l’endroit qui occupe l’une des premières places dans les prospectus touristiques… mais qu’est-ce qui pousse tant de monde à aller passer ses vacances sur cette île perdue au milieu de l’Indonésie ? Ça titille un peu la curiosité, pas vrai ?

Pourtant, nous avons failli zapper cette étape, car l’Indonésie est définitivement un pays trop grand pour être visité en 60 jours, surtout à vélo ! Mais nous nous devions d’aller vérifier, raison pour laquelle – entre autres – nous avons donné un grand coup d’accélérateur à notre traversée de Java.

Arrivée donc à Bali en ferry le 30 avril pour deux toutes petites semaines. Les changements de décor et d’ambiance se font très rapidement sentir : les mosquées sont remplacées par les temples hindous et les « Hello Mister » criards se font plus rares. En arrivant par l’ouest, on a vraiment le sentiment que ce petit bout de terre est oublié du monde, mais cette impression va très vite disparaître, à l’approche des zones touristiques…

Un peu de culture balinaise

Une forme originale d’Hindouisme – encore fortement teintée de vieilles croyances animistes – est pratiquée sur l’île depuis un millénaire. C’est la principale spécificité de Bali, par rapport au reste de l’Indonésie, pays majoritairement musulman avec d’importantes minorités chrétiennes. Si la structure sociale en castes propre à l’Hindouisme est encore vivace, elle reste peu perceptible à l’étranger de passage. C’est surtout lors des cérémonies religieuses que l’appartenance sociale prend toute son importance. En toute occasion, les  Balinais portent encore volontiers le costume et pas uniquement les jours de fête. Devant chaque maison se dresse un temple domestique, souvent imposant et très beau. Il est d’ailleurs parfois plus grand que l’habitation elle-même. Devant l’entrée, les « penjor » (de longues hampes en bambou orné et portant un petit casier à offrandes) se courbent par-dessus les routes et semblent saluer les passants. Enfin, à des heures précises de la journée, de multiples et très jolies petites offrandes sont déposées dans les temples, les autels domestiques et – de manière plus étonnante – sur les lieux de passage : seuils, entrées de garages, trottoirs pour se protéger des mauvais esprits…

Les enfants retrouvent de vieux amis : dragons et tigres, Ganesh et tous ces personnages avec plein de bras, ainsi qu’une multitude de divinités anonymes vues du Vietnam à la Malaisie qu’Hindous et Bouddhistes se prêtent volontiers. Autant Eugénie et Léon aiment piquer des fleurs sur les arbres, autant ils ne saccageraient pas une offrande. A l’inverse, ils prennent bien soin de passer à côté et de sermonner leur papa qui, maladroitement, les piétine !

La côte nord

Pour changer de Sumatra et Java, nous commençons par une jolie petite route presque plate et bordée d’arbres. Il fait bon, pas de moustiques à l’horizon et la circulation est fort raisonnable. Une première étape dans un homestay flambant neuf, charmant où nous testons notre première chambre avec WC et douche en plein air : un concept très à la mode !

La seconde étape dans un environnement campagnard nous mène à Lovina, station balnéaire où la chasse au touriste est un véritable sport pour les locaux. Il faut dire qu’hors saison, l’offre en magasins de souvenirs, restaurants à spécialités de poisson, bars et excursions pour voir des dauphins dépasse largement la demande. Nous passons trois nuits dans un petit hôtel à bungalows au milieu d’un grand jardin avec piscine.

On rencontre des Québécois, palisse !

Nous faisons la connaissance d’une famille de Québécois en route pour 6 mois et avec qui nous sympathisons immédiatement. A peine arrivés, Manon et Sylvain nous convient aux cinq ans de leur fils, pour le plus grand plaisir des enfants. Excellente entente entre Léon, Eugénie et Zachary, même si Léon trouve que son nouveau pote au nom difficile à prononcer (nous avons entendu « Safari », « Zafari », « Jacques-a-dit ») a une drôle de façon de parler. Pendant deux jours, le trio s’en donne à cœur joie entre piscine et plage de sable noir (volcans obligent !). Nous passons d’excellents moments et dégustons ensemble des spécialités balinaises dans notre cantine de Lovina, le petit bistrot tout simple qui fait la nique aux restos branchés du bord de mer.

Au moment de repartir, la séparation est difficile. Petit moment d’émotion et nous nous promettons de nous revoir au Québec ou en Suisse !

Nous nous relançons néanmoins sur les petites routes vallonnées menant à Singaraja, traversons les quartiers de pêcheurs longeant la mer avant de poursuivre par une grosse étape côtière jusqu’à Tulamben. Arrivés de nuit dans un hôtel (et plus largement, une station touristique) consacrée à 100% à la plongée sur les récifs coraliens et l’épave du Liberty (un navire américain coulé par les Japonais), nous ne nous sentons pas vraiment à notre place ici (un peu comme un courtier en assurances libéral parachuté dans une fête d’archéologues). Nous poursuivons donc dès le lendemain vers l’est, quittons la route principale de Denpasar pour aller explorer la région d’Amed à l’atmosphère beaucoup plus bohème que Lovina. Malgré la difficulté du parcours, le charme opère rapidement. Tellement rapidement que nous nous arrêtons à Bunutan, l’un des nombreux villages d’Amed après une étape de… 17 km qui nous a déjà bien usé les mollets.

Un nouveau coin de paradis

Car c’est là que nous avons trouvé notre bonheur : le Double One, petit hôtel composé d’une dizaine de bungalows agrippés dans une pente escarpée. Depuis notre très belle chambre (la catégorie « économique » se trouve tout en haut), nous avons une plaisante vue sur la mer.

Pour savourer d’excellents petits-déjeuners et profiter de la piscine, il faut par contre se rapprocher de la plage et descendre des marches de géants. Mieux vaut ne rien oublier avant de se lancer dans la descente, car la remontée est costaude même pour les plus sportifs (d’ailleurs, il n’y a aucun rondelet dans le personnel…) !

Pour un peu, on s’installerait ici jusqu’à la prochaine mousson, ou celle d’après, à l’image de Sophie, arrivée il y a six mois et qui – pas pressée de quitter l’endroit – aide à la bonne marche de l’établissement…

Pendant que les enfants barbotent dans la piscine, nous observons amusés quelques « pêcheurs » aux biscotos musclés qui se pavanent sur la plage, espérant emmener les touristes faire du snorkeling dans les coraux ou vendre à prix d’or leurs cerfs-volants.

La côte est

Nous avons toujours en ligne de mire l’échéance de notre visa et surtout, notre vol pour Brisbane la nuit du 12 au 13 mai… avec tout ce que cela comporte d’organisation logistique ! Nous quittons donc ce petit paradis après un – trop court – jour de pause.

Sans que ce soit une véritable surprise, nous allons vivre ce jour-là l’un des plus gros défis sportifs de notre voyage (et il y en a eu !). Sur le papier ou sur google maps, rien d’effrayant, le point culminant étant environ 300 m au-dessus du niveau de la mer. Avec les montées et descentes successives, on peut estimer la dénivellation cumulée des montées du jour à 700-800 mètres. Là encore, nous avons vu pire à plusieurs reprises tant en Chine qu’au Vietnam, au Laos, ou encore à Sumatra. Sauf que cette fois, nous serons en pleine fournaise, avec un taux d’humidité de forêt tropicale et surtout, des pentes impressionnantes, au point que nous nous sommes parfois demandés quelles machines ils utilisaient pour goudronner les routes…

Une fois dépassé le dernier hôtel, les aléas de la route nous mènent à des belvédères avec coups d’œil plongeants sur les criques azur et les villages de pêcheurs. Mais à chaque virage sur une bosse, le suspense: est-ce que ça redescend ? Parfois oui, d’autres fois, c’est un kilomètre de montée droit dans la pente qui donnerait froid dans le dos au montagnard le plus chevronné…

On met pied à terre et ho-hisse (cenovis)! Léon a bien pris le pli de faire l’ascension à pied, mais c’est plus difficile pour sa sœur. On la comprend : c’est plus confortable à l’ombre dans la remorque.

Les chaussures de Frédo, mises à mal par plusieurs mois de poussage rendent l’âme définitivement. Si les coutures laotiennes de la droite ont bien résisté, en revanche toute la partie centrale de la semelle a entièrement disparu : les clips ne tiennent donc plus en place que par la présence du pied, ce qui n’est pas top pour remplir leur fonction…

L’avantage d’avancer lentement est que nous avons le temps de sympathiser avec les locaux et de nous faire inviter pour le café sur un chantier de construction.

Pour le repas de midi, pas l’ombre d’un « warung » (petit resto local indonésien) ; en apprenant qu’il n’y a rien les 10 prochains kilomètres, Laure se résigne à demander de la nourriture à une modeste famille contre quelques dizaines de milliers de roupies. Heureusement, celle-ci accepte. Au menu : riz, sardine, thon (garanti local) et un petit choix de pâtisseries maison. Miam ! Ambiance sympa, les enfants du voisinage viennent s’asseoir calmement autour de nous et observent ces drôles de blancs qui ne font pas cette route pleins tubes en 4×4, pour une fois.

Partis vers 9h00, nous avons fait 18 km à 15h00 sur les 53 que compte l’étape. Mais nous avons repris des forces, ce qui nous permet de gravir la dernière grosse montée avant de redescendre vers la mer du côté d’Amlapura. Les jambes et les bras en compote, nous arrivons enfin sur des routes normales (pas plates, mais avec des pentes normales…). Nous traversons des rizières, un petit col, la station balnéaire de Candidasa pour finalement finir de nuit à Padangbai, ville côtière d’où partent les ferries pour Lombok.

Nous dénichons un hôtel avec d’étonnants cottages à toit de bambou en duplex et un bon restaurant servant du steak de barracuda : allez, après une étape pareille, on peut bien se faire plaisir ! Tous les quatre à moitié endormis sur la table, c’est le ballet des serveurs en train de boucler le resto qui nous poussera à bouger nos fesses jusqu’à notre lit…

Le lendemain, départ pour une dernière étape. Ce n’est qu’en sortant de l’hôtel que nous prenons réellement conscience de la dimension touristique de l’endroit : des milliers d’Occidentaux blancs comme des linges ou rouge écrevisse débarquent en masse de cars pour s’amasser au départ des ferries. Du coup, aucun regret de ne pas nous attarder plus longtemps ici. L’étape du jour nous mène à plat, à travers les rizières, avec quelques beaux coups d’œil sur la côte.

Après un arrêt près d’une plage, nous terminons sur des grands axes peu sexys, directement à Sanur, ville balnéaire située juste à côté du chef-lieu Denpasar.

Si rester plusieurs jours dans un secteur aussi urbain et touristique n’est pas l’idée qui nous réjouit le plus, en revanche, nous savons que c’est indispensable pour préparer au mieux notre départ avec les vélos.

Sanur car thons, pi Scott ?!

Quatre jours, c’est le temps que nous estimons suffisant pour nous assurer à l’aéroport de Denpasar que tout est OK pour que nous puissions transporter les vélos. Devant l’incompétence des employés d’agences de voyage indonésiens, nous avons en effet dû nous résoudre à réserver les vols en ligne, ce qui n’est évidemment pas idéal lorsque l’on ne voyage pas avec le paquetage standard. Surtout, il faut trouver des cartons, démonter et nettoyer vélo, tandem et remorque, tout emballer selon des mesures bien précises et conditionner l’ensemble de notre caravane. Le jeudi 9 mai, en cherchant un magasin de vélo, c’est devant les enseignes fermées que nous prenons conscience que l’on a beau être à Bali, en Indonésie, l’Ascension, c’est férié ! … et un jour de perdu, un!

Tout est donc remis au vendredi, avec plus de succès, puisque nous trouvons un magasin suffisamment complet, au personnel sympathique et compétent ; nous y allons à vélo, nos engins sont démontés et nettoyés, mis dans les cartons laissés ouverts et rapatriés en camionnette à notre hôtel. Ouf ! y’a plus qu’à … tout ressortir, renforcer le carton du tandem (bricolé à partir de deux cartons à vélo standards), jouer à tetris avec les différentes pièces détachées pour arriver pile poil au poids juste, avec l’aide de la vieille balance mécanique de l’hôtel… et ensuite faire la même chose avec toutes nos sacoches. A devenir maboule !

Le reste du temps sera consacré à la natation et à enseigner à Léon et Eugénie l’art de fermer la bouche quand on leur met la tête sous l’eau, faire des châteaux de sable, enrichir nos connaissances en matière de gastronomie indonésienne et balinaise, acheter des souvenirs, organiser le transport jusqu’à l’aéroport et notre arrivée à Brisbane, trier et jeter nos vieilleries, remplacer chaussures de vélo, tongs et maillots de bain défaillants…

En définitive, nous avons réussi à traverser Bali sans faire une seule des visites, ou attractions habituellement proposées aux touristes.

Trop fort ! Mais nous avons au moins vu la vraie vie des petits villages traversés à vélo, entretenu les biscotos, bu le café assis par terre, acheté des cerfs-volants et mangé toutes sortes de poissons… Pis surtout, c’est beau!

Aussie avec nos vélos

Dimanche 12 mai au soir, embarquement pour l’aéroport. Nous y sommes largement en avance – vers 20h00, alors que le vol est à passé minuit – par crainte de devoir réorganiser l’emballage de nos véhicules ou passer le tandem en fret (ça marche comment ? Euh… aucune idée) à la dernière minute. Afin d’éviter le même genre de gag que nous avions rencontré à Cointrin (cartons complètement ramollis par la pluie et défoncés par le personnel du tarmac) et de peaufiner l’apparence esthétique de nos vieux cartons, nous décidons d’investir 30 dollars d’emballage cellophane…

Victoire, tout passe la rampe et le tandem de 32 kilos est pesé à 21, suite à une erreur de balance, ce qui nous évite de payer la taxe de surpoids de 60 dollars. Finalement, tout s’est bien passé, la seule véritable galère ayant été d’occuper les enfants pendant les quatre heures passées à l’aéroport de Denpasar…

Arrivée à Brisbane le 13 mai au matin, aussi frais et dispos que des opossums du Queensland. Soulagement, tous nos bagages ont suivi !

Dis Freezy sharky, quels seront les nouveaux défis dans cet immense pays ? Let’s see…


4 commentaires »

  1. De sarah le 27 Mai 2013 | Répondre

    Coucou les amis!
    Ai rattrapé mon retard de lecture de toutes vos aventures avec un plaisir décuplé! Ai failli oublier de partir bosser!!J’espère que tout va bien en Australie et vous embrasse fort! Sarah

  2. De Micheline Rusterholz le 28 Mai 2013 | Répondre

    Moi aussi, je viens de rattraper mon retard. Toujours un grand plaisir à vous lire et à admirer vos photos. Ou que ce soit que vous soyez, profitez du soleil, ici, c’est la soupe grise inondée de pluie, servie bien froide. Alors, merci de me faire rêver.
    Affectueusement
    Micheline

  3. De Kathrin le 1 Juin 2013 | Répondre

    Bravo, grosse étape de passée. La gestion de l’arrivée à l’aéroport avec l’attirail semble avoir été plus éprouvante que tous les coups de pédales donnés. Tout de bon en Australie

  4. De Famille Gendre le 2 Juin 2013 | Répondre

    Nous nous faisons aussi rares dans les messages que nous vous adressons que les rayons de soleil brillant sur la Suisse. Ah, peut-être n’êtes-vous pas au courant, mais le soleil a été rayé des cartes météo de Ph. Jeanneret ! C’est terrible, c’est un type qu’on aimait bien voir à la RTSR, mais à force, il devient de moins en moins sympa.

    Imaginez : 6 mois d’hiver, ça fait long jusqu’au mois d’avril ! Bon, si c’est pour rebondir sur un printemps sec et ensoleillé, passe encore. Mais non, puissante flotte, grêlons, rafales de vent et brume nous rendent à l’évidence que le mois de novembre sera interminable cette année…
    « Si le soleil ne revenait pas ». Ce roman aurait très bien pu être écrit en 2013 par le « Monsieur des billets de CHF 200.-« .

    Bref, ce n’est plus dans le guidon, mais sous l’eau que nous avons la tête pour vous écrire ces quelques lignes.

    Soyons clairs : les images « vélhorizontales » que nous voyons au travers de notre lucarne 17 pouces, ne brunissent pas la peau, mais elles savent nous réchauffer le coeur et la tête et cela fait du bien. MERCI les amis !

    Léon et Eugènie donnent une impression de bien-être et de curiosité réjouissants. Sûr que cette « école »-là surpasse de loin tout ce que l’on apprend sur les bancs de nos classes enfantines.

    Laure et Frédo, vous n’êtes pas en reste ! Affûtés et galbés du mollet comme un maillot jaune, vous nous prouvez que le sport en plein air et meilleur pour la santé que la dégustation d’une meringue nappée de double-crème. Bien à vous !…

    Si l’on est à la page en ce qui concerne vos aventures, vous avez atteint la destination du dernier pays à pédaler. Celui pour lequel, dans notre tendre jeunesse, nous avons bien souvent donné de petits coups de pèle dans l’intention de le rejoindre, tête à l’envers.
    A votre manière, vous réalisez un rêve de gosse. Quel beau projet, encore une fois ! BRAVO !! On ne peut qu’être admiratifs…

    Laetitia, Arthur, Nathalie, Stéphane vous attendent, non sans une certaine impatience, du côté de Belfaux pour de puissantes grillades et un sacré coup de rouge 🙂

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